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Intervention de Karine Lebon

Séance en hémicycle du mercredi 27 juillet 2022 à 15h00
Règlement du budget et approbation des comptes de l'année 2021 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaKarine Lebon :

« Un travail doit être mené d'ici le prochain texte » ; « Il y aura des négociations » ; et même « Votre amendement créerait une rupture d'égalité entre les territoires ultramarins et l'Hexagone » : c'est en ces termes que les ministres et les rapporteurs présents au banc depuis deux semaines ont accueilli des amendements clés visant à soulager les habitants des territoires d'outre-mer, eux qui subissent des crises économiques et sociales s'ajoutant aux urgences locales déjà existantes. Chacun mesurera dans les phrases que j'ai citées le degré de déconnexion, voire de mépris du Gouvernement à l'égard des réalités des territoires ultramarins, que certains d'entre nous représentent dans cette assemblée. Ce comportement n'est en rien une nouveauté. Nous pointons depuis longtemps la verticalité des décisions gouvernementales et leur inadéquation vis-à-vis de la situation de nos territoires. L'année 2021, marquée par une politique économique d'ampleur, n'a pas dérogé à la règle.

Le tableau de l'exécution du budget pour 2021 a été dressé la semaine dernière. Ce budget a été caractérisé à la fois par un plan de relance mal calibré, par une baisse du montant de la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, très coûteuse pour les collectivités territoriales et par l'absence de toute contribution de solidarité des grandes entreprises – choix que vous persistez à faire. Je souhaite, pour ma part, analyser l'exécution du budget 2021 à travers le prisme des territoires d'outre-mer. La politique du « quoi qu'il en coûte », par laquelle 140 milliards d'euros d'aides ont été alloués aux entreprises, a clairement fait défaut en outre-mer. Le cadre global et général des dispositifs s'est avéré insuffisant tant il était peu adapté aux écosystèmes locaux. C'est aussi en outre-mer que l'absence de mesures pour les ménages, déjà préjudiciable au niveau national, a été la plus violente, alors que la pauvreté y est surreprésentée.

Le plan de relance n'a pas non plus répondu aux attentes. Annoncé en grande pompe lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2021, ce fameux plan, doté de 100 milliards d'euros, se voulait comme un outil de relance au service d'investissements dans la transition écologique et la compétitivité des entreprises. En outre-mer, il est impératif que les plans de relance locaux soient construits avec les collectivités locales. Or la coconstruction n'a pas permis d'adapter les mesures aux spécificités locales. L'État n'a ainsi mobilisé que 1,8 milliard d'euros pour les outre-mer, sur les 100 milliards du plan de relance. Le montant de cette mobilisation laisse dubitatif au vu des défis auxquels ces territoires font face.

Au-delà de ce montant, le fléchage trop ciblé de beaucoup d'aides n'a pas permis de prendre nos particularités en considération. Les concertations trop rapides, menées dans l'urgence, n'ont pas permis d'élaborer des dispositifs opérationnels sur nos territoires. L'absence d'assistance technique pour certaines collectivités a finalement conduit à une inadéquation importante entre les plans de relance et les spécificités des territoires. La Cour des comptes vient encore de souligner ce point.

Après avoir analysé la territorialisation des plans, un avis récent du CESE – Conseil économique, social et environnemental – « fait le constat d'un enchevêtrement de mesures qui au final ne répondent pas de manière satisfaisante aux besoins des territoires et qui laissent des exécutifs et des entreprises face à des difficultés qui ne trouvent pas de solutions », ajoutant que cela « laisse perdurer, chez un grand nombre d'Ultramarins, un sentiment de défiance et d'abandon ».

Le plan de relance, qui avait initialement suscité beaucoup d'espoir chez nombre de nos concitoyens, n'a donc pas permis de relever les défis structurels auxquels sont confrontés nos territoires concernant l'accès aux services publics, à l'éducation, au logement, à l'eau, à une alimentation saine et, bien sûr, la possibilité de vivre dignement de son travail.

Ce bilan de l'année 2021 constitue un signal d'alarme à l'heure où l'inflation maintient une situation sociale très difficile, voire explosive. Outre-mer, les ménages font face aux augmentations d'un coût de la vie qui est déjà environ 30 % supérieur à celui enregistré dans l'Hexagone. Nos entreprises sont également particulièrement touchées par l'explosion des coûts de transport et par le racket opéré par CMA CGM.

Nos spécificités doivent enfin être prises en compte. Des mesures territorialisées et concertées avec tous les acteurs locaux constituent l'unique solution pour espérer désamorcer la crise sociale à l'œuvre. Il est grand temps d'agir et de mettre fin à la succession de rendez-vous manqués entre le Gouvernement et nos territoires qui a marqué l'année 2021 et le début de la nouvelle législature.

En conclusion, suite au bilan que nous venons de dresser et en complément des éléments plus généraux présentés la semaine dernière en première lecture, vous comprendrez…

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