Nous participons tous, ici, à ce système : nous avons tous déjà commandé des colis sur internet. Le e-commerce a été précurseur de la destruction du métier, en instaurant la course à celui qui pratique les tarifs les moins chers. Amazon s'est imposé sur le marché en affichant des prix défiant toute concurrence, avant de lancer sa propre plateforme, avec des cadences infernales. Les donneurs d'ordre ont essayé de s'aligner en renégociant les contrats à la baisse. Tous ces phénomènes sont justifiés par une seule et même excuse par les donneurs d'ordre : les sous-traitants sont des indépendants. Ces pratiques relèvent d'un esclavagisme moderne mais dans le même temps, les donneurs d'ordre refusent de rendre des comptes sous prétexte d'un refus d'ingérence.
Je ne voudrais pas que le combat que nous menons avec Hervé Street conduise à ne viser que les petits transporteurs. Ne nous trompons pas de cible pour faire des opérations marketing. Au contraire, les chauffeurs livreurs sont des héros du quotidien, les fameux premiers de cordée. Certes, on ne les applaudit pas tous les soirs à vingt heures mais, sans eux, il n'y aurait pas de transport, alors qu'ils sont surexploités. Le pire, c'est qu'ils font un métier qui les passionne : leur seul diplôme, généralement, est leur permis de conduire. Chaque matin, ils sont fiers de partir en tournée pour livrer leur centaine de colis dans la journée. Je ne voudrais pas que les petits patrons qui croient en leur projet fassent l'objet de contrôles massifs. S'ils en arrivent là, c'est que les donneurs d'ordre exercent une pression croissante à leur encontre.