Mes chers collègues, nous avons l'honneur de reprendre nos travaux en accueillant M. Bruno Lasserre, président de la Commission d'accès aux documents administratifs, la Cada.
Notre commission d'enquête poursuit un double objet : d'une part, identifier l'ensemble des actions de lobbying menées par Uber pour pouvoir s'implanter en France et le rôle des décideurs publics de l'époque et émettre des recommandations concernant l'encadrement des relations entre décideurs publics et représentants d'intérêts ; d'autre part, évaluer les conséquences économiques, sociales et environnementales du développement du modèle Uber – l'ubérisation – en France et les réponses apportées et à apporter par les décideurs publics en la matière.
Au cours de nos travaux, nous avons évoqué à plusieurs reprises les risques de conflits d'intérêts entre les secteurs public et privé, le rôle des registres de déclarations des représentants d'intérêts et les contrôles réalisés, en France, par la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, mais également l'importance d'avoir accès aux documents administratifs car cet accès contribue à la transparence de la vie publique.
Votre audition intervient donc pour mieux comprendre le dispositif légal d'accès aux documents administratifs en France et le rôle de la Commission d'accès aux documents administratifs que vous présidez.
Je rappelle que la loi du 17 juillet 1978, désormais codifiée, a instauré un droit d'accès des citoyens aux documents administratifs. Ainsi, toute personne peut obtenir, dans un délai d'un mois, communication des documents détenus par une administration dans le cadre de sa mission de service public, quels que soient leur forme ou leur support. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs consacré l'existence d'un droit constitutionnel à l'accès aux documents administratifs.
Dans le cadre de nos dernières auditions, plusieurs chercheuses ont souligné l'existence de bonnes pratiques en la matière dans l'Union européenne, que ce soit à la Commission européenne ou dans certains États membres. Nous avons également cité plusieurs exemples anglo-saxons notamment. Si la France est souvent citée comme faisant partie des bons élèves, il semble que d'autres ont pu aller encore plus loin dans la transparence des relations entre l'administration et le secteur privé. Ainsi, Mme Lora Verheecke, chercheuse à l'Observatoire des multinationales et porte-parole de l'Observatoire du lobbying au niveau européen, nous a indiqué que la Commission européenne accepte de transmettre les notes de cadrage du commissaire européen et les comptes rendus de ses rendez-vous avec les représentants d'intérêts sous quinze jours si on le lui demande. De la même manière, la Suède a accepté de lui transmettre la liste des rendez-vous entre son représentant permanent auprès de l'Union européenne et les représentants d'intérêts sur un projet de directive, mais également les comptes rendus de ces réunions, le jour même de sa demande.
Il me semble que la loi française pose, pour sa part, un certain nombre d'exceptions à la transmission de documents administratifs, liées notamment au caractère préparatoire de certaines décisions administratives ou encore au secret de certaines délibérations.
Dans quelle mesure la Cada est-elle saisie de demandes de communication de documents concernant des relations entre des responsables publics et des représentants d'intérêts ? Considérez-vous que le dispositif actuel est équilibré ou qu'il devrait être amélioré, en prévoyant par exemple la possibilité de demander la liste des rendez-vous entre les décideurs politiques et les représentants d'intérêts, les notes de cadrage et les comptes rendus de réunions y afférant ?
Je rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes entendues par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».