Les outils français de lutte contre la corruption ont été renforcés à plusieurs reprises. Cela étant, le niveau de corruption en Russie n'est pas différent de celui qui existe en Chine, en Arabie Saoudite ou dans la plupart des pays autoritaires – peut-être était-il même inférieur à l'époque. Il ne faut pas tomber dans la caricature.
Qu'est-ce qu'un oligarque ? Pourquoi désigne-t-on ainsi certains grands capitaines d'industrie français : parce qu'ils sont riches, parce qu'ils sont proches du pouvoir ? S'agissant de la Russie, les oligarques désignent ceux qui, au moment de la chute de l'Union soviétique, ont capté à leur profit les richesses publiques. Or tous les responsables d'entreprise russes ne se sont pas rendus coupables de ce crime.
Les contrats ont été signés dans le respect des règles françaises et russes. Nous avons eu parfois des discussions un peu difficiles avec le gouvernement russe et avec Vladimir Poutine, mais je n'ai pas le souvenir d'avoir perdu une seule négociation – j'ai vérifié avant de me rendre à cette audition. Il y eut par exemple une négociation extrêmement difficile à propos d'un avion de transport, le Soukhoï SuperJet 100 – une sorte de petit Airbus – construit en coopération avec Thales, qui s'occupait de l'avionique, et Safran, qui fournissait les moteurs. Vladimir Poutine voulait que nous en achetions. Il menaçait, dans le cas contraire, de retirer aux Airbus A380 le droit de survoler la Sibérie. La discussion a duré trois heures. L'ensemble des gouvernements français et russes attendaient pour déjeuner : nous avons terminé à seize heures mais nous n'avons pas acheté le SuperJet 100 et l'A380 a continué à survoler la Sibérie ! Cela montre qu'à cette époque, la négociation avec la Russie était parfois difficile, mais elle était possible.