Intervention de Premier-maître Michaël Berben

Réunion du jeudi 4 mai 2023 à 11h40
Commission de la défense nationale et des forces armées

Premier-maître Michaël Berben, co-président des officiers-mariniers de APNM-Marine :

Au nom de APNM-Marine, je souhaite tout d'abord vous remercier de nous accorder régulièrement ce rendez-vous, qui est important pour poursuivre notre travail commun sur la condition du militaire, et plus particulièrement du marin. Nous nous retrouvons aujourd'hui afin d'échanger sur la future LPM de 2023-2030. Il ne nous appartient pas, comme vous le savez, de commenter les opérations ou les programmes d'armement, mais nous sommes cependant à votre écoute afin d'échanger sur la condition militaire.

Je m'exprime ainsi au nom de la présidence collégiale d'APNM-Marine, qui est constituée de trois co-présidents pour chacune des trois catégories : officiers, officiers-mariniers et équipage. Ce caractère d'inter-catégorialité est pour nous essentiel afin de donner la même force, dans le strict domaine de la condition militaire, à la voix d'un quartier-maître comme à celle d'un officier général.

APNM-Marine continue son évolution, avec à ce jour plus de 700 membres. Notre représentativité et nos capacités à répondre à nos adhérents comme aux marins qui en font la demande, favorisent ce développement. Cependant, les moyens alloués restent toujours timides au regard du développement et à la place que les APNM pourraient avoir au sein de notre institution pour jouer pleinement le rôle qui leur est confié.

C'est pourquoi, dans le cadre de la LPM, des amendements seraient possibles afin de faire évoluer positivement les APNM. De plus, la place de nos marins investis à plein temps et dont la charge est grandissante sans aide supplémentaire, devient une limite organisationnelle pour l'association et d'autres temps pleins permettrait une meilleure synergie au profit de l'institution. Il est important de rappeler que le bénévolat dans les associations décroît depuis de trop nombreuse année et APNM-Marine n'y échappe pas, amenant une charge d'engagement grandissante sur les bénévoles de notre association.

Nous nous retrouvons cette année afin d'échanger sur la LPM. À ce titre, APNM-Marine déplore le faible nombre de mesures concernant la condition militaire. Bien que nous voyions d'un bon œil l'effort réalisé afin de fidéliser les plus jeunes via la création d'apprentis au sein des armées, il reste cependant un point récurrent, que notre association pointe du doigt.

Celui-ci concerne la fidélisation des personnels brevetés supérieurs de carrière qui souhaitent quitter la condition militaire par manque d'attractivité au sein de l'institution et en raison d'une attractivité grandissante dans le monde civil, pour des spécialités comme électrotechnicien, mécanicien, atomicien ou encore dans le domaine du numérique. Qui encadrera ces apprentis s'ils ne restent pas suffisamment longtemps au sein de l'institution ?

Nous réitérons aujourd'hui notre volonté d'échanger sur les projets que porte APNM-Marine : le compte épargne permission monétisé (CEPM), que nous tenons à la disposition de la commission, mais également le projet pour faire évoluer les moyens alloués aux APNM. Ceux-ci restent d'actualité afin de préserver et de promouvoir la condition militaire.

Aujourd'hui, l'un des sujets de préoccupation majeurs des marins reste l'hébergement. En effet, des marins sont encore régulièrement déplacés de chambre en chambre au gré des arrêts techniques des navires. Certains marins célibataires géographiques s'inquiètent de ne plus avoir la possibilité d'être hébergés, de devoir chercher un studio ou même pire, quitter l'institution. À l'heure où certains se posent la question de ce choix, les marins qui ont de l'expérience et des compétences préfèrent retourner dans le monde civil, proches de leur famille, et profiter de belles propositions d'emploi plutôt que de rester dans un environnement qui ne favorise pas la fidélisation de l'ensemble des militaires de carrière.

Nous aimerions également attirer votre attention sur la protection sociale complémentaire (PSC), qui sera mise en place au profit des militaires en 2025. En effet, si la PSC permettra à tous les militaires d'avoir une couverture sociale minimum au niveau de la santé, la question de la prévoyance demeure néanmoins. Sera-t-elle en partie prise en charge comme pour les fonctionnaires ?

Il faut rappeler que les militaires d'active aujourd'hui seront les retraités de demain. Dans le cadre d'une juste reconnaissance des missions accomplies par ces derniers, il serait préjudiciable de ne pas intégrer une partie dépendance en plus du panier santé et une partie prévoyance minimum, qu'APNM-Marine souhaite voir inclure dans le panier obligatoire. Aujourd'hui, on constate un reste à charge très important pour les résidents des EHPAD privés, à hauteur de 1 800 euros.

Dans un registre similaire, APNM-Marine souhaiterait pouvoir être associée au comité de pilotage de la protection sociale du ministère, au même titre que le CSFM. En effet, aujourd'hui encore, un trop grand nombre d'organismes restent fermés aux APNM, malgré un degré d'expertise similaire au CSFM.

De plus, depuis la sortie du logiciel de simulation de solde pour la mise en place de la tranche 3 contenant l'indemnité de garnison (IGAR) et l'indemnité d'état militaire (IEM), nos marins sont inquiets. En effet, à la lecture de leur simulation, certains marins ont constaté que leur revenu fiscal de référence augmenterait. Ce faisant, ils changeront de tranche et perdront les prestations sociales afférentes à leur ancien revenu fiscal de référence, ce qui aura pour conséquence la paupérisation de facto des militaires et de leurs familles.

Après avoir subi une perte de solde avec la mise en place du bloc 2 pour certains marins, la fiscalisation de certaines primes et indemnités ne rassure toujours pas. Cette nouvelle série de mesures est difficilement comprise par les marins, qui constatent le risque d'un nouveau délitement de leur pouvoir d'achat, déjà lourdement affecté par l'inflation.

APNM-Marine regrette de ne pas être associée aux différents projets sur la condition militaire, malgré ses multiples demandes auprès de la DRH-MD. Ainsi, nous n'avons pas pu transmettre nos réflexions ni dialoguer sur les sujets de la PSC ou la nouvelle politique de rémunération des militaires (NPRM). Il est bien regrettable que les APNM ne soient pas sollicitées plus activement par l'institution. Nous éprouvons le sentiment amer de ne pas voir reconnu le travail effectué par les APNM au profit de la communauté militaire. Nos adhérents, un peu plus nombreux chaque année, veulent obtenir de vraies réponses.

Vous comprendrez aisément qu'à l'heure de cette nouvelle LPM, il est tout aussi important d'intégrer les moyens capacitaires que de se préoccuper de la condition militaire. C'est pourquoi nous regrettons que le sujet de la concertation ne soit pas abordé au sein de la LPM, avec la possibilité de voir évoluer les APNM après huit années d'existence.

Force est de constater qu'au fil de nos auditions, certains sujets n'ont toujours pas progressé, comme la fidélisation des militaires de carrière, l'évolution des familles recomposées ou l'augmentation du célibat géographique au sein de la Marine. Nous saluons tout de même la prise en compte dans la loi des tarifs militaires SNCF, ainsi que la création d'un tarif pour les enfants non à charge, que l'APNM-Marine avait fortement défendu auprès des parlementaires et de notre institution. Malheureusement, cette même institution oublie bien trop souvent que les APNM font partie de la concertation et qu'il est important de ne pas nous écarter.

Enfin, APNM-Marine tient à remercier les députés de la commission de défense qui nous ont reçus ces derniers mois, afin que nous puissions leur présenter nos projets sur la condition militaire. Nous nous félicitons d'ailleurs de ces échanges fructueux. En conclusion, les dossiers visant à l'amélioration de la condition du militaire nécessitent que tous les concertants soient associés aux travaux. Il semble important qu'APNM-Marine puisse dialoguer avec le CSFM, afin d'apporter l'expression d'une complémentarité de ces deux instances de concertation.

Monsieur le président, je tiens à vous exprimer au nom des trois co-présidents, mais également de nos adhérents, nos sincères remerciements pour cette invitation et pour l'attention accordée.

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