J'ai suivi le cas Uber files à travers la couverture détaillée que la presse a pu en offrir. Je connais donc assez bien l'affaire, y compris son volet français.
Selon moi, il est très difficile de prendre en compte tous les aspects des interactions entre les lobbyistes et les décideurs publics : tout système est confronté à des limites. Toutefois, je suis convaincue que les ministres et les membres de cabinets devraient être obligés de divulguer les réunions qu'ils tiennent avec les lobbyistes. Celles-ci doivent être inscrites dans leur agenda, afin d'assurer la traçabilité du contenu.
Je ne connais pas les obligations actuellement en vigueur dans ce domaine en France mais je sais que d'autres pays ont déjà légiféré sur la question. De même, les commissaires européens doivent déclarer les réunions qu'ils tiennent avec les lobbyistes. Par conséquent, cette obligation me semble légitime.
Il existe toutefois une question de plus en plus prégnante sur la communication avec les représentants du secteur privé et les lobbyistes. Cette communication se situe en dehors des canaux de communications traditionnels. Je pense par exemple aux sms échangés entre Ursula von der Leyen et le directeur de Pfizer à propos de la négociation d'un contrat de doses de vaccins. Le médiateur européen mène une enquête à ce titre en ce moment, dont les résultats seront intéressants. En effet, il s'agira là d'une décision inédite pour ce type d'échanges par textos.
On peut étendre ce cas d'école aux échanges effectués sur les plateformes électroniques ou les fils de discussion. Si ce type de communication est considéré comme officiel, la loi devrait également s'appliquer. La Commission soutient que ces échanges éphémères n'ont pas été identifiés. De fait, une fois que les sms ont été effacés, on ne peut plus les récupérer, ni en débattre.
Je plaide naturellement pour une plus grande transparence et j'estime que des échanges significatifs peuvent avoir lieu par sms ou en parlant au téléphone, c'est-à-dire via des canaux de communication non traditionnels. Ce problème devrait à l'avenir être pris en compte dans les différents pays de l'UE. L'Europe fonctionne de cette manière itérative, en tirant des enseignements des expériences déjà vécues, en partageant les meilleures pratiques des voisins.
Tout dépendra de la décision qui sera prise au niveau européen : si celle-ci plaide pour une plus grande transparence, elle incitera les législations nationales à en faire de même, notamment en France.