Il me semble que la situation est assez claire. L'enquête de l'OCLTI portait sur une présomption de travail dissimulé pour la période 2015-2016. Elle estimait que l'entreprise organisait bien le travail des autoentrepreneurs, fixait les tarifs, donnait les instructions et sanctionnait le cas échéant ses livreurs. Par conséquent, sur ce chef d'accusation, le parquet a requis la peine maximale pour Stuart, et notamment des peines de prison avec sursis pour les deux cofondateurs.
Mais, étant donné que seulement huit livreurs ont été entendus, la justice a décidé d'une relaxe sur ce chef d'accusation. Cela ne signifie pas que ce travail dissimulé n'existe pas, mais plutôt que les preuves manquent pour l'attester dans une décision de justice. Par conséquent, l'OCLTI pourra, demain, mener une nouvelle enquête sur des travailleurs autoentrepreneurs de Stuart. À cet égard, Stuart a-t-il toujours recours à des autoentrepreneurs ?
Sur le second volet, Stuart aurait eu recours à des entreprises de sous-traitance qui embauchaient des livreurs. À la suite de l'enquête de l'OCLTI sur le travail dissimulé, le groupe a-t-il préféré opérer différemment en passant par des sociétés de sous-traitance ?
Par ailleurs, dans ce domaine, les révélations qui ont été portées à notre connaissance sont extrêmement choquantes. Nous savons que Stuart a utilisé de manière systématique des sous-traitants, qui n'ont pour objet que de servir d'écran, selon Maître Jérôme Giusti. Ce dernier a été l'avocat d'un ancien travailleur d'une société de sous-traitance, qui a travaillé pour Stuart pendant six ans. Celui-ci est notamment intervenu dans un reportage d' Envoyé spécial diffusé au mois de juin 2022 où il a reconnu avoir recruté des milliers de coursiers dans une quarantaine de villes et généré plus de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires sans n'avoir jamais rien déclaré.
Stuart verse donc de l'argent à ses sous-traitants, qui payent ensuite les livreurs, en prenant une commission de 20 à 30 % sur chaque course. Cependant, ces travailleurs n'ont aucun statut, ils ne sont même pas autoentrepreneurs. Il n'existe donc ni cotisation, ni facture, ni TVA, ni fiche de paye. Finalement, en moins de six ans, au moins huit sociétés avaient été créées, en sachant qu'une vingtaine de sociétés travaillaient pour Stuart. Chacune d'entre elles avait une espérance de vie de moins d'un an, afin d'éviter les contrôles de l'administration fiscale.
En clair, il s'agit d'une organisation extrêmement problématique, à caractère frauduleux, mise en place pour tenter d'échapper aux obligations sociales et fiscales. Je sais que Stuart a fait appel et que notre commission d'enquête peut voir ses investigations limitées, mais je souhaiterais que vous réagissiez à l'extrême gravité de ces faits.