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Intervention de Jérôme Fournel

Réunion du jeudi 13 avril 2023 à 9h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Jérôme Fournel, directeur général des finances publiques :

Nous n'effectuons pas d'évaluation d'un éventuel manque à gagner. Dans le cadre de nos contrôles et de nos échanges, nous avons pu aboutir à un niveau de redevances que nous estimons convenable. Nous pourrons vous transmettre des éléments qui montrent ces niveaux de redevance et les interrogations qui peuvent demeurer en la matière. S'agissant du niveau des profits, il ne faut pas s'attendre à des niveaux colossaux.

Par essence, les plateformes sont constituées de cascades de sociétés. En l'espèce, la société Uber BV est la filiale néerlandaise de la société américaine Uber. Les stratégies d'évitement, d'évasion ou de localisation de trésorerie dans des paradis fiscaux et dans des États à fiscalité privilégiée ne concernent parfois pas l'assiette française de l'impôt mais l'assiette globale européenne. Pour ce qui concerne les sujets de profit, nous nous assurons que la rémunération de l'activité française, qui se traduit par une redevance payée par la société néerlandaise, se situe au niveau où nous sommes en droit de l'attendre.

Je vous propose d'élargir la réponse au sujet des groupes. Aujourd'hui, en lien avec les piliers 1 et 2 de l'OCDE et la réforme de la fiscalité internationale des sociétés multinationales, nous sommes régulièrement interrogés par ces dernières. Parfois, ces sociétés nous sollicitent pour mettre en place un accord sur les prix de transfert.

Historiquement, dans le cadre de l'OCDE, il s'agit fréquemment d'activités de type « cost plus » : aux coûts des filiales de distribution et de support local s'ajoute une marge à négocier au regard des pratiques du secteur économique afin de déterminer la rémunération localisée en France du bénéfice.

Dans certains cas, nous contestons cette pratique du « cost plus ». Au regard de la logique de fiscalisation internationale de type « partage des bénéfices », qui est en germe dans le pilier 1, nous raisonnons en termes de « division de la marge » afin de fixer la redevance. Le principe est celui du partage de la marge en fonction des marchés de destination, du support ou du lieu des brevets, des licences et de la marque ou encore du « quartier général » de l'entreprise.

Ces débats sont conduits entreprise par entreprise et nécessitent de bons arguments. La production de richesse est réalisée en France et n'existe pas in abstracto hors du territoire dans lequel le service est produit. Dès lors, il convient d'adopter une logique de « profit split » entre les activités en France et les activités des maisons-mères. Nous nous efforçons de promouvoir cette logique auprès des entreprises du secteur numérique.

Une autre convention judiciaire d'intérêt public a d'ailleurs porté sur Google en 2019. Une fois de plus, le sujet portait sur le niveau de rémunération permettant de s'assurer que la France récupère une part importante de la fiscalité, en lien avec la logique de partage global de marge, et non pas de « cost plus », soit les coûts assortis d'un petit supplément.

À chaque cas de ce type, je dois mener un débat avec mes homologues étrangers, qui arguent que les brevets et licences localisés dans leurs pays permettent à l'activité de se déployer en France. Ces questions se trouvent donc au cœur de nos discussions de manière permanente. À ce titre, les équipes du service juridique et du contrôle fiscal cherchent en permanence à localiser la part de profit la plus importante en France. Toutefois, si l'évasion fiscale se produit par ailleurs dans un autre pays, je ne peux connaître son existence et ne peux contrôler Uber BV.

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