Nous suivons soixante-quinze affaires de corruption, dont un nombre marginal concerne des phénomènes d'ingérence étrangère. Nous sommes principalement saisis d'affaires de corruption internationale dans lesquelles nous cherchons à vérifier si un agent public étranger a été corrompu par une entité française ou qui a une activité en France. Parallèlement, nous traitons cinq ou six affaires dans lesquelles se pose de manière directe la problématique de l'ingérence étrangère en France.
Il est délicat de vous répondre car la corruption est une infraction difficile à prouver. Il est souvent malaisé de déterminer comment et à quelles fins l'agent a été corrompu. On suspecte parfois, mais sans pouvoir le démontrer, que la corruption est motivée par plusieurs objectifs. Certains sont très directs : il peut s'agir, par exemple, du déblocage d'une situation sur un marché. D'autres peuvent être plus diffus : il peut y avoir une volonté de s'assurer, pendant une période assez longue, parfois plusieurs décennies, de la fidélité d'une personne dotée d'une certaine influence. Cette personne peut rester longtemps inactive avant d'être sollicitée sur un sujet particulier. Il est très difficile de le prouver. Cela peut alimenter notre réflexion dans le cadre de la mission de renseignement criminel mais cela a rarement des répercussions judiciaires.
L'affaire du Parlement européen, qui a été traitée par nos homologues belges, présente des caractéristiques hors normes pour ce qui est de la démonstration de la preuve. Il ne nous arrive jamais de trouver les valises de billets. Nous devons nous contenter de faisceaux d'indices, de petits éléments qui peuvent paraître anodins mais qui, mis bout à bout, peuvent emporter l'intime conviction des magistrats.