Je partage cette analyse : la relation entre l'Union européenne et l'OTAN constitue l'élément clé. Lorsque la défense européenne a été lancée, il était question du « pilier européen de l'OTAN ». Ce concept est passé de mode. Le plus grand défi me semble de rendre compatibles les notions d'autonomie stratégique et de « pilier européen de l'OTAN ». Durant de nombreuses années, j'ai essayé d'expliquer à des collègues ou à des diplomates de divers pays – Pologne, Allemagne, etc. –, à Bruxelles, que l'idée d'autonomie stratégique et d'une défense européenne n'était pas incompatible avec l'Alliance atlantique et qu'elle aurait même pour effet de renforcer celle-ci. Faire passer ce message n'est pas simple car plusieurs États européens perçoivent la notion d'autonomie stratégique comme une alternative à l'OTAN. Si cette vision prédomine, la défense européenne n'aura aucune chance d'aboutir.
Le premier ministre polonais vient d'arriver à Washington. Il a critiqué les propos récents du président français sur la notion d'autonomie stratégique, plaidant plutôt pour un « partenariat stratégique » avec les États-Unis. Ces deux concepts ne doivent pas être antagonistes. L'autonomie stratégique et le partenariat stratégique doivent pouvoir coexister, faute de quoi il n'y aura pas de défense européenne. S'il n'existe qu'un partenariat stratégique sans une forme d'autonomie au sein de l'Union européenne, nous assisterons à une vassalisation de l'Europe.