Monsieur Rousselet, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de vous être rendu disponible rapidement pour répondre à nos questions en tant que président de l'un des premiers groupes de taxis à Paris, la G7.
À partir du 10 juillet 2022, plusieurs membres du consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) ont publié ce qu'il est désormais convenu d'appeler les Uber files : s'appuyant sur 124 000 documents internes à l'entreprise américaine datés de 2013 à 2017, cette enquête a dénoncé un lobbying agressif de la société Uber pour implanter en France, comme dans de nombreux pays, des véhicules de transport avec chauffeur (VTC) venant concurrencer le secteur traditionnel du transport public particulier de personnes réservé jusqu'alors aux taxis.
Dans ce contexte, notre commission d'enquête poursuit un double objet : d'une part, identifier l'ensemble des opérations de lobbying menées par Uber pour pouvoir s'implanter en France, le rôle des décideurs publics de l'époque et émettre des recommandations concernant l'encadrement des relations entre les décideurs publics et les représentants d'intérêts ; d'autre part, évaluer les conséquences économiques, sociales et environnementales du développement du modèle Uber, l'ubérisation, en France, et les réponses apportées et à apporter par les décideurs publics en la matière.
Dans la mesure où vous étiez l'un des premiers concernés par l'implantation de la société Uber et, plus largement, par l'essor des VTC, il nous est apparu naturel de vous entendre pour que vous puissiez nous donner votre analyse à la fois de l'évolution du secteur du transport public particulier de personnes depuis 2014, des méthodes de lobbying de la société Uber et des vôtres, qui ont fait l'objet d'une couverture médiatique importante, et des conséquences du modèle Uber sur le secteur des taxis et sur votre entreprise aujourd'hui. Nous serions très intéressés d'avoir votre retour d'expérience sur cette période, sur le nouveau paysage concurrentiel dans lequel vous évoluez ainsi que sur ses conséquences économiques, sociales et environnementales.
Outre votre réaction aux révélations et à ces sujets, pourriez-vous nous indiquer comment votre groupe s'est adapté à la concurrence des plateformes de VTC ? Quelle est aujourd'hui la situation du secteur des taxis sur le marché de la réservation préalable et sur le marché de la maraude ? Combien y a-t-il de taxis aujourd'hui à Paris et en France ? Quel est le nombre de VTC, si vous pouvez l'estimer ? Quelle est la part de votre entreprise dans ce secteur ?
Plus largement, nous souhaiterions également connaître vos recommandations sur l'avenir de votre secteur d'activité. À titre d'exemple, j'ai noté que la plateforme Uber proposait désormais des services de taxis en plus des VTC. Qu'en pensez-vous ? Avez-vous été consulté ? Quel en est l'impact sur votre profession ? Par ailleurs, un projet de directive européenne relatif à l'amélioration des conditions de travail dans le cadre du travail via les plateformes prévoit une présomption réfragable de salariat pour l'ensemble des travailleurs de ces plateformes. Pensez-vous que cette réforme, si elle était votée, aurait un impact sur le fonctionnement des plateformes VTC et sur le marché de la réservation préalable ? Nous aurons ensuite d'autres questions sur l'encadrement du secteur des représentants d'intérêts et du lobbying.
Je rappelle que cette audition est ouverte à la presse et qu'elle est retransmise en direct sur le site de l'Assemblée nationale.
Avant de vous laisser la parole pour vous présenter en quelques minutes et d'entamer les échanges, je rappelle que l'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes entendues par une commission d'enquête de prêter serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».