La décision de justice concernant Deliveroo est très claire. Les juges estiment que la société a présenté des preuves de sa parfaite connaissance du caractère frauduleux de ses pratiques concernant le travail dissimulé, qu'elle avait donc pleinement conscience d'agir en totale illégalité et qu'elle a érigé le travail dissimulé en système volontairement générateur de concurrence déloyale vis-à-vis d'autres plateformes qui, elles, respectaient la relation de subordination avec leurs travailleurs.
Les juges ont même révélé l'existence d'un document interne intitulé ops versus legal, soit « pratique contre droit ». C'est un texte assez instructif, présentant un tableau comparatif des éléments de langage à bannir ou à privilégier pour donner une bonne impression en matière d'indépendance des livreurs et ne pas prêter le flanc aux arguments favorables à leur requalification en salariés. Vous dites que la fraude est grave mais la société Deliveroo a été condamnée non seulement pour travail illégal, mais aussi pour avoir eu pleinement conscience qu'elle s'adonnait à une activité frauduleuse, dans une décision de justice historique, particulièrement sévère et, selon moi, totalement justifiée.
S'agissant des travailleurs sans-papiers, j'aimerais obtenir des précisions sur les procédures de vérification rigoureuses que vous avez évoquées.
Enfin, quelles modifications la décision de justice visant Deliveroo a-t-elle induites dans vos procédures ? Vous avez dit que les livreurs étaient libres d'accepter ou non une course. Or la décision de justice a révélé que tel n'était pas le cas : les tarifications appliquées aux livreurs dépendaient totalement de leur notation interne, qui elle-même dépendait du nombre et des horaires des courses qu'ils réalisaient. Il existe un faisceau d'indices démontrant la subordination du livreur à la plateforme ayant pour effet de modifier la tarification qui leur est appliquée. En quoi vos procédures et vos rapports avec les livreurs ont-ils été modifiés ?