Intervention de Danielle Simonnet

Réunion du jeudi 30 mars 2023 à 12h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Simonnet, rapporteure :

J'entends ce que vous dites sur la nécessité de former, d'éduquer à la culture démocratique et à l'exigence de transparence donc de donner des moyens pour développer les services de déontologie. Néanmoins, compte tenu de la nature oligarchique du système, liée à la porosité entre nombre de décideurs publics et de dirigeants clefs des secteurs économique et médiatique, et à la place des grandes écoles – tout le monde pense à l'ENA, l'École nationale d'administration, mais il n'y a pas qu'elle –, qui conduisent à recruter le même personnel dans les champs politique, économique et médiatique, je ne pense pas qu'on puisse établir seulement par la formation une véritable séparation entre l'État et les lobbys, une démocratie vraiment indépendante des intérêts privés. Il faut aussi réfléchir au développement de contre-pouvoirs démocratiques et à l'instauration d'un cadre législatif plus contraignant, plus coercitif, afin que la transparence ne dépende pas simplement du bon vouloir des acteurs concernés.

Le cas d'Uber est très intéressant. Ses dirigeants ne sont pas stupides. Ils ont recruté aux États-Unis M. Plouffe, ancien conseiller de M. Obama, au niveau européen l'ancienne commissaire Neelie Kroes, et en France Grégoire Kopp, qui a fait partie du cabinet de M. Vidalies. La stratégie est claire : il s'agit, partout, d'aller prendre au sein du monde politique des gens qui sont au cœur des processus décisionnels et de mettre la main, par le biais de cabinets de lobbying, sur les coordonnées des parlementaires, afin de leur envoyer des amendements, et de tous ceux qui pourraient servir de relais pour modifier le cadre législatif et réglementaire. Face à cette approche systémique, on a l'impression que l'État est totalement désarmé, qu'il se laisse phagocyter dans une opacité absolue.

L'objet de notre commission d'enquête parlementaire n'est pas de relever les illégalités commises, même si nous en découvrons dans la façon de procéder d'Uber, au-delà de la sphère politique, mais un tel mode de fonctionnement est quand même le signe que notre démocratie est plus que malade.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion