Intervention de Alice Navarro

Réunion du jeudi 30 mars 2023 à 12h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Alice Navarro, directrice-adjointe de l'AFA, ancienne conseillère juridique du directeur général du Trésor et référente déontologue et alerte de la direction générale du Trésor du ministère de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique :

Il existe un dispositif pénal sanctionnant la prise illégale d'intérêts qui figure aux articles 432-12 et 432-13 du code pénal. Si l'intérêt en question avait été contemporain de l'époque où cette personne exerçait ses fonctions, elle se serait trouvée en situation de prise illégale d'intérêts. Si à la date où elle exerce ses fonctions, ses intérêts sont anciens et n'existent plus, l'infraction n'est pas constituée. On se trouve alors au cœur de la question des allers-retours entre le privé et le public et de l'emploi dans le privé d'agents qui viennent du secteur public. Au-delà du cadre réglementaire strict, limité à une période de temps de trois ans pour le pantouflage, la question n'est plus pénale mais participe plus des sujets de transparence et de neutralité qui président à l'exercice d'une activité de fonctionnaire.

L'AFA a publié un guide sur la prévention des conflits d'intérêts dans l'entreprise. L'idée, au-delà de ce qui est prévu en droit pénal et même s'il n'y a pas d'obligation en matière, est d'inciter les gens à déclarer spontanément leurs intérêts, afin de rendre leur exercice professionnel beaucoup plus serein. Nous expliquons en effet que si surgit la question d'un intérêt, même passé, c'est-à-dire qui n'est plus susceptible de recevoir une qualification pénale, les suspicions que cette révélation pourra générer sont susceptibles de discréditer l'action menée. Il faut faire de la pédagogie, en rappelant que les débats peuvent se cristalliser autour de cette question au détriment du débat de fond.

Par ailleurs, lorsque l'existence d'un intérêt est contemporain à l'exercice des fonctions publiques, les règles sur le déport doivent être édictées, diffusées et contrôlées. C'est ce que nous préconisons et vérifions dans le cadre de nos contrôles. Nous préconisons également, en-dessous des seuils légaux qui imposent, pour les plus hautes fonctions, un contrôle préalable à la désignation, que toute personne, dans l'administration, qui recrute un agent, qu'il vienne du secteur privé ou non, examine sa situation au regard d'éventuels conflits d'intérêts qui pourraient exister avec les fonctions qu'il va exercer et engage un dialogue à ce sujet, même si aucun texte ne l'impose, pour anticiper un éventuel déport. L'AFA préconise également dans ses recommandations de prévoir des déclarations écrites de conflit d'intérêts ou d'absence de tels conflits, notamment pour les fonctions les plus exposées (recrutement, marchés publics, etc.).

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