Intervention de Benjamin Haddad

Réunion du jeudi 30 mars 2023 à 9h00
Commission d'enquête relative aux révélations des uber files : l'ubérisation, son lobbying et ses conséquences

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBenjamin Haddad, président :

Mes chers collègues, nous avons l'honneur d'accueillir les trois cofondateurs d'une jeune plateforme de mise en relation entre des soignants indépendants et des établissements de santé, la plateforme Mediflash.

MM. Stanislas Chastel, Maxime Klein et Léopold Treppoz, nous vous souhaitons la bienvenue et vous remercions de vous être rendus disponibles pour participer à cette audition. Vous le savez, à partir du 10 juillet 2022, plusieurs membres du consortium international des journalistes d'investigation ont publié ce qu'il est désormais convenu d'appeler les Uber Files : s'appuyant sur 124 000 documents internes à l'entreprise américaine datés de 2013 à 2017, cette enquête a dénoncé un lobbying agressif de la société Uber pour implanter en France, comme dans de nombreux pays, des véhicules de transport avec chauffeur (VTC) venant concurrencer le secteur traditionnel du transport public particulier de personnes réservé jusqu'alors aux taxis.

Je vous rappelle que notre commission d'enquête poursuit un double objet : d'une part, identifier l'ensemble des opérations de lobbying menées par Uber pour pouvoir s'implanter en France et le rôle des décideurs publics de l'époque et émettre des recommandations concernant l'encadrement des relations entre les décideurs publics et les représentants d'intérêts ; d'autre part, évaluer les conséquences économiques, sociales et environnementales du développement du modèle Uber en France, et les réponses apportées et à apporter par les décideurs publics en la matière.

Votre audition s'inscrit davantage dans cette seconde optique, pour connaître l'origine et le fonctionnement de la plateforme Mediflash qui se présente comme une plateforme permettant aux professionnels du soin indépendants, essentiellement infirmiers et aides-soignants, de participer à des « missions de renfort valorisantes et très bien rémunérées ».

Notre commission d'enquête s'intéresse particulièrement aux nouvelles formes de travail résultant du développement des plateformes d'emplois notamment, et plus particulièrement à la question du statut des travailleurs des plateformes.

La réglementation en vigueur en France laisse le choix aux plateformes et à leurs employés d'arbitrer entre salariat ou travail indépendant. L'évolution de la jurisprudence montre que dans le secteur des mobilités – qui est différent de celui de votre plateforme – il y a une tendance à la requalification des travailleurs indépendants en salariés en raison de l'existence d'un lien de subordination de fait entre la plateforme et ses employés.

Qu'en est-il au sein de la plateforme Mediflash ? Les travailleurs du secteur de la santé passant par votre plateforme sont-ils attachés au statut d'indépendant ou non ? Comment un infirmier ou une aide-soignante par exemple peuvent-ils s'inscrire sur votre plateforme et entrer en contact avec un établissement de soin ? De quelle manière sont-ils rémunérés : par la plateforme ou par l'établissement de soins ? Qui fixe le niveau de rémunération ? Quelle est la commission prise par la plateforme pour le service d'intermédiation auprès du personnel soignant et auprès de l'établissement de soins ?

Notre commission se demande également si une plateforme comme la vôtre n'a pas pour effet de se substituer, d'une certaine manière, à des entreprises d'intérim dans lesquelles les travailleurs ont un statut de salarié.

Au-delà de la seule question du statut de l'employé des plateformes, se posent d'autres questions relatives aux droits et obligations des plateformes et de leurs employés en matière de gestion algorithmique, de transparence de leurs relations commerciales et de droit au recours en cas de déconnexion. Pouvez-vous nous indiquer les mesures prises par la plateforme Mediflash en la matière ? Enfin, considérez-vous aujourd'hui que votre business model repose essentiellement sur un statut d'indépendant pour les travailleurs auxquels vous avez recours ou s'agit-il d'un élément secondaire de l'offre que vous fournissez ? Je vous remercie d'avance pour la qualité de vos réponses.

L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes entendues par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

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