Nous avons l'honneur d'accueillir M. Emmanuel Puisais-Jauvin, secrétaire général aux affaires européennes. Monsieur, nous vous souhaitons la bienvenue et vous remercions de vous être rendu disponible pour participer à cette audition.
À partir du 10 juillet 2022, plusieurs membres du consortium international des journalistes d'investigation ont publié ce qu'il est désormais convenu d'appeler les Uber Files : s'appuyant sur 124 000 documents internes à l'entreprise américaine datés de 2013 à 2017, cette enquête a dénoncé un lobbying agressif de la société Uber pour implanter en France, comme dans de nombreux pays, des véhicules de transport avec chauffeur (VTC) venant concurrencer le secteur traditionnel du transport public particulier de personnes réservé jusqu'alors aux taxis.
Dans ce contexte, notre commission d'enquête poursuit un double objet : d'une part, identifier l'ensemble des opérations de lobbying menées par Uber pour pouvoir s'implanter en France, le rôle des décideurs publics de l'époque et émettre des recommandations concernant l'encadrement des relations entre les décideurs publics et les représentants d'intérêts ; d'autre part, évaluer les conséquences économiques, sociales et environnementales du développement du modèle Uber en France, et les réponses apportées et à apporter par les décideurs publics en la matière.
Votre audition s'inscrit davantage dans cette seconde optique, compte tenu de l'émergence de nouvelles formes de travail résultant du développement des plateformes d'emplois notamment, entre le travail indépendant et le salariat comme le montrent l'évolution de la jurisprudence de la Cour de cassation sur ces sujets et les discussions en cours au niveau européen sur le projet de directive relative à l'amélioration des conditions de travail des travailleurs des plateformes d'emplois.
Nous souhaiterions donc connaître l'état des négociations au sein de l'Union européenne (UE) sur ce projet de directive qui vient d'être amendé puis adopté par le Parlement européen, le calendrier d'examen du texte et la position de la France qui, selon la presse, semblait plutôt défavorable à la présomption réfragable de salariat pour l'ensemble des travailleurs des plateformes.
À cette occasion, pourriez-vous brièvement nous rappeler le rôle du secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) et ses relations avec la représentation permanente française à Bruxelles ainsi que le fonctionnement du trilogue entre la Commission européenne, le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne pour l'adoption de ce projet de directive ?
Pourriez-vous également rappeler les différentes options envisagées lors de l'élaboration de ce projet de directive sur le statut des travailleurs des plateformes numériques et les choix opérés par la Commission européenne puis le Parlement européen à ce stade ?
Pouvez-vous nous préciser le champ d'application du texte retenu par le Parlement européen et son contenu ? Est-ce que toutes les plateformes numériques seraient concernées par la présomption de salariat ou seulement certaines d'entre elles ?
Au-delà de la seule question du statut de l'employé des plateformes, se posent d'autres questions relatives aux droits et obligations des plateformes et de leurs employés en matière de gestion algorithmique, de transparence et de droit au recours. Pouvez-vous nous éclairer sur ces sujets ?
Dans le cadre de ces négociations, avez-vous été témoin d'actions de lobbying de la part des plateformes pour orienter les choix de la Commission européenne, du Parlement européen ou des États membres ? Ces actions de lobbying sont-elles comparables à celles d'Uber révélées par les Uber files ? Je vous remercie d'avance pour la qualité de vos réponses.
L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires impose aux personnes entendues par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité. Je vous invite donc à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».