Madame la députée, sauf votre respect, je ne partage pas du tout votre raisonnement. Juridiquement, l'inscription au registre des DPS est une mesure administrative qui ne s'apparente absolument pas à une peine. Vous dites que c'est une condamnation à perpétuité, une peine qui s'ajoute à la peine : juridiquement, ce n'est pas le cas.
L'administration pénitentiaire prend quotidiennement, à l'égard des personnes détenues, des mesures qui sont restrictives de leur liberté et qui s'ajoutent à la seule peine de privation de liberté. Ces décisions sont justifiées par les nécessités de l'ordre public pénitentiaire.
Certains régimes de détention impliquent des restrictions supplémentaires. Le détenu qui est en quartier de préparation à la sortie et celui qui est à l'isolement dans une maison centrale sécuritaire ont des régimes de détention complètement différents, et ce sont bien des décisions administratives qui les fondent. La décision de placer un détenu à l'isolement – parfois pour des années –, en raison de son profil ou de son comportement, est une décision administrative. Toutes ces décisions sont prises sous le contrôle du juge administratif, mais ce sont des restrictions supplémentaires qui vont au-delà de la peine, au-delà de la décision du juge judiciaire.
Ces décisions administratives, qui sont la spécificité irréductible du service public pénitentiaire, sont prises en permanence. Je ne crois pas que, pour être acceptables, elles devraient toutes être judiciarisées ; ou alors il faut décider que le placement au QI ou au quartier disciplinaire doit revenir au juge judiciaire.
La spécificité du service public pénitentiaire, que l'on ne retrouve dans aucun autre service public, c'est qu'un certain nombre des décisions que prend l'administration pénitentiaire sont restrictives de liberté et qu'elles ne sont pourtant pas prononcées par le juge judiciaire. Ce n'est pas une spécificité française : cela vaut pour tous les services publics pénitentiaires du monde.
Depuis les années 1990, le droit pénitentiaire européen s'est largement introduit dans le droit pénitentiaire français. Les garde-fous et les mesures de contrôle sont nombreux. Toutes ces décisions sont désormais prises sous le contrôle du juge administratif et, très souvent, pour des durées déterminées. Précisément, la décision d'inscription au registre des DPS n'est jamais prise que pour un an ; sans décision de confirmation dans l'année civile qui s'écoule, elle tombe automatiquement. Il n'y a pas de reconduction tacite au registre des DPS.