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Intervention de Stéphane Bredin

Réunion du mercredi 29 mars 2023 à 17h30
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements au sein de l'administration pénitentiaire et de l'appareil judiciaire ayant conduit à l'assassinat d'un détenu le 2 mars 2022 à la maison centrale d'arles

Stéphane Bredin, ancien directeur de l'administration pénitentiaire :

En tant que haut fonctionnaire, je tiens compte des décisions définitives de l'autorité judiciaire et de la juridiction administrative, qui vont dans le même sens. Personne n'a obtenu de la cour d'appel de Paris ou du Conseil d'État qu'ils jugent en ce sens. En tant que directeur de l'administration pénitentiaire, lorsque je remets ma proposition au Premier ministre, je tiens compte de ces décisions de justice récentes, motivées, qui me semblent conforter mon analyse du dossier.

Certains peuvent estimer a posteriori, surtout quand on connaît la fin de l'histoire, que le risque pénitentiaire mis en avant, c'est-à-dire le trouble à l'ordre public extraordinaire qui résulterait d'une évasion de MM. Alessandri et Ferrandi, est ridicule parce que ces derniers n'avaient plus d'appui à l'extérieur, qu'ils n'avaient jamais manifesté d'intention de s'évader et que, de toute façon, ils n'en auraient pas eu l'occasion matérielle. Mais c'est tout le raisonnement qui se tient, c'est-à-dire le trouble à l'ordre public exceptionnel qui résulterait d'une telle évasion.

Je sais bien que comparaison n'est pas raison, mais je vais prendre l'exemple de deux détenus dont le statut de DPS a été maintenu en raison du trouble exceptionnel à l'ordre public qui résulterait de leur évasion, même si ce risque est faible : je pense à Carlos, qui est incarcéré à Poissy et qui est DPS depuis plusieurs décennies, essentiellement pour cette raison. Je pense aussi à Michel Fourniret, qui a été inscrit au registre des DPS jusqu'à sa mort. Peut-être l'en a-t-on retiré lorsqu'il était en fin de vie, à l'hôpital de Fresnes mais, jusqu'au bout, il a été DPS pour ce motif. On peut se demander si les critères sur lesquels l'administration pénitentiaire se fonde pour inscrire ou maintenir certains détenus au registre des DPS sont pertinents : je pense que cela fait partie des réflexions de votre commission. Mais il est certain que nous n'avons pas tordu le droit pour inscrire, puis maintenir au registre des DPS, les seuls membres du commando Érignac, en forgeant, à leur seul préjudice, une doctrine des DPS qui n'aurait valu que pour eux.

La doctrine vaut pour toute une série d'autres détenus. Je n'ai donc pas eu le sentiment, en proposant cette décision au Premier ministre, d'être l'instrument d'une décision politique. Je l'ai proposée en mon âme et conscience comme, de manière très mécanique, le bureau de la détention confirme, d'année en année, des détenus au registre des DPS qui ont des parcours lisses en détention mais qui, en raison des faits qu'ils ont commis et qui leur ont valu leur condamnation, présentent ce risque spécifique. Ni plus, ni moins.

Cela renvoie à la question des critères sur lesquels se fonder pour inscrire ou maintenir au registre des DPS certains détenus. Mais il y a un pas, que je ne franchis pas, qui consisterait à dire que, pour une motivation purement politique, le directeur de l'administration pénitentiaire a proposé aux gardes des Sceaux successifs – sujet que je n'ai jamais évoqué avec les trois précédents gardes des Sceaux avec lesquels j'ai travaillé – ou avec le Premier ministre, le maintien de MM. Alessandri et Ferrandi, même après 2017, au registre des DPS.

Voilà ce que j'essayais de dire, le plus complètement et le plus distinctement possible, monsieur le président.

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