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Intervention de Michel Castellani

Séance en hémicycle du jeudi 6 avril 2023 à 9h00
Accès à une alimentation saine — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichel Castellani :

La France a beau être une puissance agricole, elle ne nourrit pas tous ceux qui ont faim. Les repas sautés, les produits qu'on n'ose envisager parce qu'ils sont trop chers, les privations pour pouvoir nourrir les enfants sont une réalité pour un nombre croissant de nos concitoyens. En 2021, entre 3,2 millions et 3,5 millions de personnes ont dû recourir à l'aide alimentaire. C'est trois fois plus qu'il y a dix ans, et ces chiffres, déjà astronomiques, ne tiennent pas compte de tous ceux qui renoncent aux réseaux d'aide parce que ceux-ci se trouvent trop loin de leur domicile, et que l'essence, elle aussi, est chère, ou parce que la pauvreté est une étiquette trop lourde à porter et que le regard des autres est pesant. Ils se résignent à avoir faim. Alors, que faire pour les aider ?

Du côté du Gouvernement, on nous parle du programme Mieux manger pour tous. Le Gouvernement proposera même un amendement de réécriture de l'article 1er pour inscrire dans le cadre de cette proposition de loi ce nouveau dispositif d'aide alimentaire. Mais en quoi consiste-t-il ? Pour l'instant, ses contours sont flous. Une seule chose est certaine, il sera abondé de 60 millions d'euros, ce qui permettra de verser 40 millions d'euros par an aux associations d'aide alimentaire. C'est bien, mais il faut rappeler que, étant donné l'élargissement de leur public, elles ne disposeront que de 10 euros supplémentaires par personne et par an – ce chiffre est suffisamment éloquent. Les 20 millions d'euros restants permettront de soutenir les alliances locales de l'alimentation et l'instauration de chèques verts ou de paniers solidaires.

Voilà donc quel est le sort réservé au chèque alimentaire, tant de fois mis sur la table et tant de fois écarté. Nous avons beau être favorables à une approche plus locale des politiques publiques, nous redoutons qu'avec ce dispositif seul un nombre très réduit de nos concitoyens accède à ce coup de pouce financier.

Il faut évoquer aussi la déception des agriculteurs français, qui misaient sur cette aide pour soutenir la transition agroécologique. La promesse initiale a été réduite à peau de chagrin. La proposition des écologistes avait le mérite de voir plus grand. Les revenus trop faibles sont la première barrière à l'accès à une alimentation de qualité. Il faut donc renforcer les politiques en faveur de la réduction de la précarité. C'est justement ce que vous aviez mis sur la table. Sans doute le dispositif n'était-il pas suffisamment calibré. Il est vrai que rien ne garantit que la prime alimentaire bénéficie aux produits de qualité. Mais l'article 1er , dans sa rédaction initiale, posait un premier jalon ambitieux dans la lutte contre la faim et son adoption nous aurait laissé du temps pour travailler aux contours d'un véritable chèque alimentaire.

Non seulement la pauvreté rend l'accès à la nourriture difficile, mais elle contraint aussi ceux qui en souffrent à acheter des aliments bas de gamme et moins sains. Les plus précaires sont aussi les plus touchés par l'obésité. La faute en revient à une alimentation peu diversifiée, qui ne fait pas suffisamment de place aux fruits, aux légumes et à de la viande et des poissons de qualité. Sur ce point également, la proposition de loi, avant d'être en partie réécrite en commission, proposait quelques pistes.

La première d'entre elles était l'option végétarienne à tous les repas ou, chaque semaine, deux menus végétariens sans autre choix, dans la restauration collective. Pour nous, c'était une piste à explorer, à condition de renforcer la formation des gestionnaires de restauration collective. Sans cela, cette nouvelle obligation aurait pu se traduire par un regain de produits transformés et de gaspillage alimentaire. De même, avant d'interdire les additifs nitrés, nous considérions qu'il fallait accompagner la filière dans son changement de pratique, pour éviter que les traiteurs et les charcutiers ne remplacent ces produits par d'autres plus dangereux encore pour la santé.

Nous devons relever le défi de garantir l'accès à une alimentation durable et de qualité. Cette proposition de loi nous permet de nous saisir de ces sujets, et, nous l'espérons, d'avancer dans la lutte contre la précarité alimentaire. C'est en tout cas l'objectif du groupe LIOT.

1 commentaire :

Le 24/09/2023 à 17:15, Aristide a dit :

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"elle ne nourrit pas tous ceux qui ont faim."

si en plus ceux qui ont faim refusent de manger de la viande, on n'est pas sorti de l'auberge...

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