Avant toute chose, je vous remercie de nous avoir invités à nous exprimer à ce sujet, si important pour nous. Rendre les élèves autonomes, c'est l'objectif en vue duquel s'engagent au quotidien les personnels d'éducation, d'enseignement et de santé, au premier rang desquels les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Or, pour relever le défi de l'inclusion, il faut assurer à ces élèves un environnement stable, serein, adapté à leurs besoins spécifiques, qui leur permette d'évoluer et d'accéder à l'autonomie : il faut du temps, des infrastructures et un accompagnement humain de qualité. L'engagement sans faille des AESH, en dépit des conditions difficiles et de l'isolement dans lesquelles ils exercent, ne suffit pas à pallier les méfaits de la gestion comptable de la prise en charge du handicap au sein de l'éducation nationale.
Concernant ces personnels, leurs droits, leurs conditions de travail, ce que nous constatons sur le terrain est alarmant et a des conséquences catastrophiques en matière d'inclusion des élèves, ou plutôt de leur non-inclusion, voire de leur exclusion, puisqu'ils sont parfois privés de leur droit fondamental à l'éducation : n'oubliez pas, en écoutant la suite de mon propos, que ce sont ces élèves qui constituent notre priorité. Les chiffres l'emportent sur les êtres humains et sur les conditions dans lesquelles on prétend inclure les élèves handicapés : chaque AESH accompagne jusqu'à onze élèves, âgés de 3 à 20 ans et présentant des besoins extrêmement divers. Par ailleurs, 80 % des AESH ont obtenu au moins le baccalauréat, 92 % sont des femmes, 98 % travaillent à temps partiel : ce dernier paramètre, qui ne peut s'expliquer que par une politique de recrutement délibérée, est source de stress pour les élèves comme pour les personnels. Selon le ministère de l'éducation nationale, le salaire d'un AESH s'élève en moyenne à 897 euros par mois, ce qui, ajouté aux facteurs que je viens de citer, entraîne un défaut d'attractivité du métier et un turnover particulièrement important – démissions, difficultés de tous ordres.
Si un AESH exerce normalement 24 heures par semaine, volume nécessité par l'accompagnement d'un enfant à l'école maternelle ou élémentaire, ce temps de travail peut tomber à 15 heures, 12 heures, voire moins : nous recevons régulièrement des appels de collègues dont la situation est dramatique, car elles n'ont d'autre choix que d'accepter des affectations de 9 heures hebdomadaires, dans des zones très étendues, avec des prises en charge très compliquées et une formation indigente. Simultanément, de nombreux élèves notifiés ne se voient pas attribuer d'AESH, ou ne bénéficient pas du nombre d'heures d'accompagnement auquel ils ont droit : leurs parents ne sont même pas toujours informés de ces situations. Pour le Snes-FSU, il y a là une aberration : d'un côté la souffrance des enfants non pourvus, de l'autre celle de personnels à qui l'on refuse un travail à temps plein !
Les AESH sont les premiers témoins du non-respect du droit des élèves, de cette souffrance que l'institution leur inflige. Ils voient les pôles inclusifs d'accompagnement localisés (Pial) les mettre en concurrence entre eux : lorsque l'on accompagne deux élèves, comment se trouver en même temps avec l'un en cours d'anglais et avec l'autre en cours d'espagnol ? Des choix aussi difficiles sont souvent laissés à la seule appréciation de l'AESH, lequel, je le répète, est très isolé dans l'exercice de ses fonctions. Tout cela ne vise qu'à faciliter la gestion de la pénurie d'AESH par les Pial, qui se bornent à une logique comptable et, au mépris des besoins, font du saupoudrage afin d'accroître sur le papier le nombre d'élèves accompagnés – parfois, dans les faits, une ou deux heures par semaine, alors que l'équipe pédagogique constate qu'il en faudrait beaucoup plus. Peut-être reviendrai-je plus tard sur ces situations difficiles : toujours est-il que, pour le Snes-FSU, il conviendrait d'assurer aux élèves comme aux AESH un cadre stable, sécurisé, favorable à l'acquisition de l'autonomie et à un accompagnement respectueux des besoins de chacun.
La reconnaissance de la profession d'AESH, de sa pénibilité et des qualités requises passe nécessairement par la création d'un corps de catégorie B, ayant un employeur unique, et une revalorisation salariale substantielle.