Je vous remercie de m'avoir invité pour débattre de ce sujet ô combien sensible et important, compte tenu de la situation. Comme l'ont expliqué les intervenants précédents, on observe une augmentation des violences de l'extrême droite partout sur le territoire. À Lyon, depuis maintenant dix ans, on ne connaît que trop bien cette situation : si j'énumérais toutes les agressions et les attaques survenues durant cette période, nous serions là jusqu'à minuit. Hier soir encore, un compte Twitter a révélé de nombreuses activités sur des canaux Telegram : l'extrême droite préparait des attaques de mosquées et des tentatives d'assassinat d'élus de la République.
Outre l'augmentation du nombre de violences de l'extrême droite, on observe aussi une augmentation de leur niveau. Des chiffres ont été rappelés au cours des dernières séances ; je ne vais pas y revenir. En 2021, Europol a signalé une explosion des actes terroristes de l'extrême droite ; 45 % des arrestations effectuées en Europe pour tentative ou projet d'attentat l'ont été sur le sol français, ce qui est inquiétant. On a observé que cette évolution était directement liée à la normalisation des discours de l'extrême droite sur de nombreux plateaux de télévision. Ces théories, comme celle du grand remplacement, ont poussé des terroristes à passer à l'action ; elles sont complotistes et profondément antisémites.
Il est également inquiétant de constater, sur le terrain et, de manière générale, dans le champ politique et médiatique, une confusion totale sur la question du terrorisme, qui est faite à tous les niveaux – au point que le ministre de l'intérieur lui-même a parlé de « terrorisme intellectuel », qui est un concept d'extrême droite.
Cette confusion est faite par paresse intellectuelle, par méconnaissance du sujet ou peut être révélatrice de mauvaises intentions, afin de semer le trouble et permettre à des groupuscules de continuer tranquillement à cultiver leur terreau et à mener des actions.
Au-delà du mépris dont font preuve les personnes qui, animées de mauvaises intentions, évoquent la question du terrorisme – j'ai cité le « terrorisme intellectuel » –, cela nous empêche de lutter efficacement contre le terrorisme et d'endiguer le phénomène.
On entend également beaucoup que le terrorisme de l'extrême droite nationaliste suprémaciste blanche serait moins dangereux – voire pas vraiment dangereux – parce qu'il existe un autre terrorisme, le terrorisme djihadiste. Nous considérons au contraire qu'il faut mener une lutte commune contre ces deux formes de terrorisme. Rappelons que ce qu'on appelle le terrorisme djihadiste est en réalité issu d'idéologies d'extrême droite, même si celle-ci se distingue de l'extrême droite occidentale classique – suprémaciste blanche, donc. Elle est une autre idéologie d'extrême droite, fondée sur les mêmes principes, prônant une société dans laquelle tous les droits humains seraient détruits, la construction d'un homme nouveau qui serait purifié et l'extinction des droits des femmes, des personnes LGBTI et de toutes les différences ethniques et religieuses, s'attaquant aux valeurs de la démocratie en menant des actions qui s'accompagnent d'une violence extrême et s'imposent par la force. Oui, ils sont prêts à tout, même à terroriser les populations civiles en les tuant. On peut le nommer terrorisme des extrêmes droites, et pas seulement de l'extrême droite.
La Jeune Garde connaît mieux que quiconque la lutte contre le terrorisme, notamment celui des extrêmes droites. En effet, des personnes proches de nos mouvements antifascistes ont combattu au cœur de la Syrie contre Daech et d'autres groupes terroristes. Ils y ont vu les pires atrocités des dernières décennies, et les ont combattues. Ils ont contribué à évincer Daech sur le terrain et donc, en toute logique, à limiter aussi le nombre d'attentats qui auraient pu être commis sur le sol français.
Nous ne souhaitons jamais voir ces monstres se développer à nouveau sur notre territoire, parce qu'on connaît mieux que personne les atrocités qu'ils sont capables de commettre, que ce soit au nom d'une religion, d'une race ou d'une nation. Il faut très rapidement instaurer des outils pour se protéger de toutes les violences commises par l'extrême droite, qui peuvent aller jusqu'à se traduire par des attentats terroristes. En effet, le débat ne porte pas seulement sur la question des violences en général, mais sur une violence bien particulière et très meurtrière qu'est le terrorisme. Par ailleurs, il faut arrêter de confondre les concepts et bien les nommer, afin de lutter efficacement contre le terrorisme ; on parle de personnes qui ont été tuées.