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Intervention de Christophe Deloire

Réunion du jeudi 16 février 2023 à 18h15
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

Christophe Deloire, secrétaire général de Reporters sans frontières :

Il y a des législations européennes : le règlement sur les marchés numériques (DMA) et le règlement sur les services numériques (DSA), et le code de bonnes pratiques contre la désinformation, dorénavant dérivé du deuxième de ces deux règlements. Nous soutenons la législation européenne sur la liberté des médias, qui nous semble aller dans le bon sens. Nous connaissons les critiques dont elle fait l'objet. Nous considérons nous aussi qu'elle ne va pas assez loin sur certains points. Ainsi, l'article 17 n'impose aux plateformes que l'obligation, très légère, de faire leur possible pour prévenir les médias faisant l'objet de mesures de modération un peu avant leur application.

Nous croyons qu'il faut recréer des équilibres dans l'espace public. Les médias apportant la preuve qu'ils s'astreignent à des obligations en matière de transparence, par exemple sur la propriété, de mise en œuvre de la méthodologie journalistique et de respect des règles éthiques, doivent bénéficier d'une forme d'exception.

Le risque aujourd'hui, c'est de donner aux plateformes numériques le pouvoir de distinguer le vrai du faux. C'est toujours très dangereux. Mark Zuckerberg avait imposé à son algorithme l'information selon laquelle le virus du covid n'était pas sorti des laboratoires de Wuhan – certes, il a changé d'avis lorsque Joe Biden a déclassifié un rapport de la CIA à ce sujet. Personnellement, je n'en sais rien, mais je souhaite être en mesure de lire des enquêtes diverses et variées pour me forger une conviction. En tout cas, nous devons être très attentifs sur ce point. Dans les démocraties, nous veillons, de façon très légitime, à faire en sorte que l'État n'institue pas un ministère de la vérité ; il ne faudrait pas que les plateformes numériques puissent le faire. La question est de savoir comment promouvoir l'intégrité sans que personne ne soit en mesure de dire où est la vérité. Il faut favoriser l'honnêteté et l'intégrité sans restreindre la liberté d'analyse et de vision. Or, dans une société de plus en plus polarisée, certains peuvent avoir tendance à considérer que la vérité est là où ils se trouvent et l'obscurantisme ailleurs.

S'agissant des influences étrangères dans les médias, nous avons lancé le projet Forbidden Stories, qui s'est développé par lui-même ensuite. J'ignore s'il y aura d'autres révélations.

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