Ayant signé et ratifié la convention sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales de 1997, la France se devait de prendre certaines dispositions. En 2012, elle a été alertée par le rapport d'évaluation que j'ai mentionné. Les États-Unis n'ont donc pas dicté notre législation. Celle-ci a donné lieu à un travail préparatoire où le Parlement a joué un rôle important puisque la convention judiciaire d'intérêt public a été adoptée par amendement. Cet outil s'est révélé efficace pour le Trésor public, puisqu'il permet de sanctionner certaines pratiques sans menacer les intérêts économiques des entreprises, c'est-à-dire sans qu'elles soient exclues de l'ensemble des appels d'offres internationaux.
La loi Sapin 2 s'est élevée contre le caractère inadmissible de l'extraterritorialité américaine. Bien que cela n'entre pas dans la définition de l'ingérence étrangère, il est incontestable que les Américains utilisent le droit pénal aux fins de soutenir les intérêts économiques de leurs entreprises, ce qui a eu des conséquences directes.
Lorsque j'ai rédigé mon rapport sur l'intelligence économique, le ministre estimait que nous étions mal outillés pour collecter cette information diffuse qui permet d'anticiper la naissance d'un marché ou des opportunités. Cette intelligence utilise non les moyens d'espionnage mais l'information ouverte.
Aujourd'hui, grâce à l'exploration des données ou data mining, l'intelligence artificielle aide les autorités à enrichir les contrôles fiscaux et à cibler les comportements litigieux. L'enjeu essentiel est d'appliquer ce qui a été fait dans le domaine fiscal à la lutte contre la corruption et le blanchiment.
Il faut aussi renforcer le partage d'informations entre États, surtout en présence d'obstacles. Cela est d'autant plus important que la corruption et l'insécurité ont partie liée. Face à ces menaces, nous devons nous outiller pour préserver nos intérêts économiques.
Lorsque je travaillais à la DREE, le monde était régi par le contrôle des changes et des marchés de capitaux, donc par un verrouillage important. Avec le marché unique, le traité de Maastricht et le passage à l'euro, tout cela a disparu. Or la libre circulation des capitaux favorise les mouvements frauduleux et le blanchiment. C'est notre talon d'Achille. Nous devons renforcer nos moyens d'investigation et de collecte d'information, d'où l'importance de laisser ouvert le registre des bénéficiaires effectifs.