Intervention de André Gattolin

Réunion du jeudi 16 février 2023 à 18h15
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

André Gattolin, sénateur des Hauts-de-Seine :

Je propose d'assurer la transparence sur le financement des travaux de recherche, comme c'est le cas aux États-Unis depuis les années 1920.

Il convient d'éviter la naïveté. Je suis législateur mais je crois beaucoup à l'autorégulation. La loi ne vaut rien si elle est difficile à appliquer. En outre, elle peut toujours être détournée – ces procédés sont rendus plus faciles par l'évolution de la technologie. Il importe de développer une éthique des acteurs. Je vous donne un exemple : lors de la venue du dalaï-lama en France, en 2016, alors que de nombreuses institutions avaient annulé les conférences qu'il devait tenir, le Sénat, en l'absence de toute haute autorité, l'a accueilli, conformément à l'engagement qu'avait pris Gérard Larcher trois ans plus tôt. En dépit des ingérences, il nous appartient de nous réguler. Toutes les formations politiques comptent dans leurs rangs des personnes soupçonnées d'intérêts ou de trop grandes sympathies à l'égard de tel ou tel pays. Quand ces personnes demandent à siéger au sein de certaines commissions, leur formation politique les en dissuade. Je suis moi-même issu d'un parti dont certains membres ont des sympathies pour la Chine. Il faut veiller à faire le ménage chez soi et à s'appliquer les règles que l'on impose aux autres.

Je me considère comme un lobbyiste de l'État de droit. Le fait que je sois un soutien historique de la cause du Tibet ne m'a pas empêché, il y a quelques années, de dénoncer une dérive illibérale dans le comportement d'un responsable tibétain. La commission suprême de justice tibétaine en exil m'a donné raison. Je refuse de cautionner des groupes dont le fonctionnement n'est pas démocratique et des activités qui ne respectent pas certaines valeurs.

Certains parlementaires se rendent dans des pays pas très démocratiques. Il faut faire bien entendu attention, car les relations sont parfois compliquées avec ces États. Toutefois, il est important que nous nous intéressions à des minorités ou des populations opprimées qui ne bénéficient pas de droits démocratiques dans leur pays car le Gouvernement ne peut pas le faire : il entretient des rapports plus ou moins exigeants avec les autorités, quelles qu'elles soient.

Il ne faut fermer la porte à aucun pays mais il convient de conserver une éthique. Il s'agit d'être fidèle à ses valeurs dans l'aide qu'on apporte à des démocrates ou à des pays en transition – on ne devient pas une démocratie en un jour. Or ce n'est pas toujours le cas.

Il faut sensibiliser les gens aux risques qu'ils prennent pour leur réputation. Dans un monde très médiatisé, la menace réputationnelle oblige à faire preuve de prudence. Pour ma part, je me renseigne toujours avant de soutenir des personnes, même au nom de la liberté.

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