Les vols en jets privés sont emblématiques de l'injustice sociale, environnementale et fiscale. Cela n'est plus à démontrer. Pourtant, la présente proposition de loi suscite une hostilité particulière : sur les vingt amendements à discuter, sept, issus du Rassemblement national, des Républicains, de Renaissance et du groupe Démocrate, visent à supprimer ses articles. Il s'agit pourtant de la mesure qui pénalise le moins de monde, pour l'impact le plus fort et le plus immédiat en faveur du climat.
Ce texte n'est pas radical. Il prévoit des exceptions permettant le maintien des trajets en aéronef. Il ne s'agit pas d'une opposition simpliste à l'aviation, comme on a pu l'entendre.
La justice sociale et environnementale nous impose de tenir compte des réalités. En voici une : chaque année, 1 000 vols sont effectués en jet privé entre Paris et Nice – pour le travail, vraiment ? – qui polluent autant que 40 000 familles effectuant ce même trajet avec une voiture thermique. D'après Santé publique France, la pollution de l'air entraîne de 48 000 à 80 000 décès prématurés par an, soit au moins 10 % de la mortalité en France. Sachant qu'un jet émet à peu près 2 tonnes de CO2 en seulement une heure, pour un taux d'occupation moyen de 4,7 passagers, alors qu'une personne émet 8 tonnes de CO2 pendant une année entière, il est évident qu'il faut agir pour plus de justice environnementale et sociale.
Selon les exposés sommaires de certains amendements, cette proposition de loi serait contraire à la Constitution au motif qu'elle contrevient aux libertés d'aller et venir et d'entreprendre. Celles et ceux qui mettent en avant ces arguments ignorent que la liberté d'entreprendre peut parfaitement être encadrée sur le fondement de la Charte de l'environnement, qui fait partie du bloc de constitutionnalité. Celle-ci consacre en effet le principe de précaution, en son article 5 ; et son article 1er dispose que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé », sans même parler des équilibres naturels.
La proposition de loi va donc dans le sens d'un juste effort des plus riches. Elle est juste socialement car elle demande aux ultrariches un effort de solidarité avec les autres Françaises et Français. Elle est juste d'un point de vue environnemental car elle permet de réduire la pollution qui pèse sur l'ensemble de la population. Évidemment, cette mesure ne suffira pas à sauver le climat, mais elle s'inscrit résolument dans une exigence d'exemplarité alors que nous demandons au plus grand nombre d'adapter ses habitudes en matière de mobilité, notamment avec les ZFE.
Pour toutes ces raisons, nous voterons en faveur de cette proposition de loi.