Puisque j'assume une mission de présidence, je trouve normal d'être interpellé. Je souhaite donc prendre du temps pour évoquer ce sujet devant cette commission.
Comme je l'ai indiqué, mon activité consiste désormais à être président fondateur de Topics, une société qui mène des missions d'expertise, de conseil et d'accompagnement auprès des entreprises. La société AT Kearney m'a contacté et m'a indiqué avoir été chargée par la société Uber de réfléchir sur les enjeux du dialogue social 2.0 dans le cadre d'une initiative du gouvernement. Ce cabinet devait coordonner un travail d'experts sur ces sujets et a sollicité mon expertise. Je n'avais donc aucune raison de refuser, disposant d'un certain niveau de connaissance du marché du travail, du dialogue social et des enjeux du numérique dans notre pays. Je rappelle une fois encore que j'ai été, cinq ans auparavant, l'auteur du premier rapport national pointant les opportunités mais aussi les risques de la transformation numérique du travail.
J'ai donc participé à ces travaux pendant à peu près un semestre. Parmi les thèmes abordés, nous nous sommes livrés à une analyse comparative du statut d'indépendant, notamment sur les enjeux de protection sociale et d'accident du travail en France et à l'international. Nous avons également donné des réponses aux questions relatives à la structuration du futur dialogue social dans le cadre de l'économie des plateformes. Encore une fois, j'assume cette responsabilité, qui a été rémunérée par AT Kearney – et non par Uber – dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée par Uber. Je tiens à disposition de votre commission le montant de cette rémunération et vous transmettrai les factures si cela m'est demandé.
Je ne suis pas ici pour défendre la société Uber compte tenu de la neutralité que m'impose ma fonction de président de l'Arpe. Cependant, à l'époque, je pensais plutôt qu'il était pertinent qu'une entreprise américaine aussi peu familière de nos pratiques sociales cherche à disposer d'un certain nombre d'expertises. Pour compléter mon propos, sous serment, je n'ai pas passé un seul appel pour porter le point de vue d'Uber à l'issue des travaux d'expertise précédemment mentionnés. Je n'ai pas plus participé à des réunions pour accompagner Uber dans un rôle de lobbying et d'influence.
Lorsque le Gouvernement m'a proposé cette mission, je lui ai immédiatement signalé avoir été conduit à travailler deux ans auparavant, dans le cadre de mon métier de conseil, au sein d'un groupe d'experts établi par AT Kearney lors de sa mission pour Uber, dans le cadre des travaux que je viens de décrire. Le Gouvernement n'a pas vu d'obstacle à ce que j'anime cette mission de préfiguration. Je suis même allé plus loin : lorsque je me suis présenté aux représentants et des travailleurs et des organisations, j'ai spontanément signalé le fait qu'Uber avait fait appel à moi pour réaliser une mission de préfiguration.
Pendant toute la phase de préfiguration, cela n'a pas posé souci. À l'issue de cette mission en revanche, un certain nombre d'acteurs, et c'est leur droit, ont trouvé cela anormal ou choquant. Mais, encore une fois, tous ces éléments étaient connus du Gouvernement. Apporter son expertise ne signifie pas perdre son autonomie ni être dépendant ou sous influence d'Uber.