Intervention de Florian Colas

Réunion du mercredi 15 février 2023 à 15h30
Commission d'enquête relative aux ingérences politiques, économiques et financières de puissances étrangères-États, organisations, entreprises, groupes d'intérêts, personnes privées-visant à influencer ou corrompre des relais d'opinion, des

Florian Colas, directeur national du renseignement et des enquêtes douanières :

Le principal schéma observé aujourd'hui permet de vendre directement à la clientèle française ou européenne, par le biais du commerce en ligne, des produits à un prix inférieur de 20 à 30 % à celui de produits européens similaires, parce que les entreprises considérées ne prévoient à aucun moment de payer ni TVA ni droits de douane. Ce schéma est rendu possible par le système logistique. Prenons pour exemple un appareil photo. À sa sortie d'usine, il est emballé et placé dans un petit colis qui se fondra dans le flux de millions de petits colis dirigés vers la France. La valeur déclarée ne sera pas la valeur réelle du bien ; l'objet déclaré lui-même sera ou ne sera pas un appareil photo. Dans la chaîne intégrée, une série d'acteurs logistiques assurent l'acheminement performant de l'objet tout en rendant impossible le traçage de l'expéditeur initial, de sorte que si jamais l'appareil photo vient à être contrôlé par l'administration des douanes dans le flux des petits colis ou dans un entrepôt, il sera extrêmement difficile de savoir par qui il a été originellement expédié. Il faudra ouvrir le colis et reconstituer, très difficilement, sa valeur réelle pour démontrer l'écart avec la valeur déclarée. Si je parle de schéma industriel, c'est parce que ce type de fraude n'est pas le fait spontané d'individus. Des sociétés logistiques se sont manifestement spécialisées dans l'alimentation de ce type de flux. Lutter contre ces phénomènes est aujourd'hui une des grandes priorités assignées à notre service par le ministre des comptes publics Gabriel Attal.

Très fréquemment, dans notre activité relative au contrôle des exportations et des transferts de technologie, les fraudes douanières que nous détectons s'insèrent dans un système visant à se procurer des biens ou des technologies françaises ou d'autres pays occidentaux en transitant par la France, pour alimenter des programmes d'armement, de renseignement, spatiaux, etc. Il nous faut démêler l'écheveau d'un grand nombre d'intermédiaires financiers qu'il n'est pas toujours possible de rattacher clairement à un État, mais qui visent à créer une chaîne pour alimenter des programmes portés par des institutions étatiques.

Pour ce qui est du contournement de l'application des sanctions, on se trouve face à des cas divers, personnes physiques cherchant simplement à faire sortir de l'argent pour gérer leur patrimoine et institutions étatiques qui tentent de maintenir des flux économiques ou financiers avec des acteurs à l'extérieur de leurs frontières.

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