Je retiens l'ensemble des qualificatifs que vous proposez.
Je tiens à préciser que la notion de « haut de spectre » n'est pas très usitée dans l'administration pénitentiaire, ni dans le renseignement pénitentiaire. Quand on considère qu'un individu est « haut de spectre », c'est qu'il présente une dangerosité dans un certain contexte, qui varie selon qu'il est libre ou incarcéré. Un individu comme Franck Elong Abé, combattant, très ancré idéologiquement, présentait une dangerosité terroriste absolument certaine pour peu qu'il eût été remis en liberté. Cela dit, une fois en détention, une nouvelle évaluation est faite de sa dangerosité compte tenu de l'incarcération. La prison a pour fonction de maîtriser la dangerosité des individus – en tout cas d'essayer de le faire –, de la contenir, d'entraver leur liberté.
Au moment de son incarcération, la dangerosité terroriste de Franck Elong Abé a donc été réévaluée par le renseignement pénitentiaire, comme on le fait pour tous les autres détenus TIS ou radicalisés. Une fois cette évaluation établie, on essaye de savoir quelle menace le détenu représente de manière imminente, en détention, pendant son incarcération. En l'occurrence, le renseignement pénitentiaire n'a jamais considéré que Franck Elong Abé, pendant son passage en détention à Arles, constituait une menace imminente pour la sécurité de l'établissement ou du point de vue du risque terroriste. Il était très rigoureusement suivi ; il était considéré comme dangereux ; comme vous le savez, on s'inquiétait particulièrement de sa sortie ; mais on n'avait aucun élément laissant entendre qu'il représentait une menace imminente au sein de l'établissement.
Cette évaluation a été revue régulièrement dans le cadre des réunions du groupe d'évaluation départemental (GED) avec l'ensemble de la communauté du renseignement. Au sein de la classification que nous utilisons pour déterminer le degré de dangerosité et la menace que représente un individu, Franck Elong Abé n'était pas au sommet. Je ne ferai pas référence à des notions comme le « haut de spectre » ; il s'agit bien d'une classification en fonction de la dangerosité évaluée au sein de la maison centrale d'Arles. Il n'y a jamais été considéré comme présentant le degré de menace le plus élevé, car nous n'avons jamais eu d'information suggérant qu'il allait commettre un passage à l'acte violent. Cela a été évalué plusieurs fois en GED, et il n'y a jamais eu de débat sur le niveau qui lui était attribué dans la classification.