Nous examinons le treizième texte consacré à l'épidémie de covid-19. La tentation est grande de le voir comme un texte de plus présenté devant une assemblée habituée, dans une France accoutumée. « L'habitude, ce confort mortel » nous mettait en garde François Mitterrand – si mortel que la France accepte ces décès hebdomadaires que nous devons encore aujourd'hui à la covid-19 et oublie parfois le chiffre des 148 000 morts de l'épidémie dans notre pays. Ce sont autant de familles françaises pour lesquelles le souvenir des années covid sera non pas celui des gestes barrières ou des contrôles aux frontières, mais bien celui de la perte d'un proche et, trop souvent, celui de l'impossibilité de l'accompagner dans ses derniers instants. C'est en leur mémoire que nous devons nous efforcer de nous hisser au-dessus des préjugés, des oppositions stériles et des postures de confort.
Car c'est bien de notre confort que cette épidémie nous a sortis. Elle nous a obligés à prendre des décisions que nous n'imaginions pas la veille. La covid-19 nous a obligés à prendre les mesures les plus dures, à restreindre les libertés de nos concitoyens, à éloigner physiquement les Français les uns des autres. Leur adhésion a toujours eu pour condition leur confiance dans les mesures prises : étaient-elles nécessaires et proportionnées ? C'est la question qui définit le mieux notre État de droit. J'ajouterai : la mesure est-elle juste ? Nous, représentants de la nation, sommes les premiers garants de ce triptyque et les députés socialistes ont toujours œuvré en ce sens.
Alors que la sévérité de l'épidémie a diminué mais que le virus est encore présent et continue de muter, je rappellerai les trois axes que les députés socialistes ont défendus en commission en première lecture et qui ont été expliqués par ma collègue Marietta Karamanli : d'abord, la nécessité d'une expertise publique transparente ; ensuite, l'établissement d'une échelle de référence permettant d'évaluer la situation de manière objective et de créer du consensus ; enfin, la protection de l'égalité sanitaire entre les citoyens. Je veux les réaffirmer. Le premier texte du quinquennat, proposé par le Gouvernement ne disposant pas d'une majorité parlementaire, a fait l'objet de transformations profondes à l'issue de l'examen successif par l'Assemblée nationale et le Sénat.
Tout d'abord, l'abrogation des régimes d'exception, qui avaient, pour reprendre le mot de Paul Éluard, « le dur désir de durer », est enfin permise. Ne restent que les mesures de mise en quarantaine des personnes, de placement et de maintien en isolement. Elles seront encadrées par l'expertise de la Haute Autorité de santé et sous le contrôle du juge des libertés. Dans trois mois, un rapport sera remis au Parlement et le ministre sera auditionné, pour faire le point sur l'état du droit et des propositions d'amélioration.
Ensuite, la prolongation des systèmes d'information de pilotage d'épidémie a été encadrée, avec le recueil du consentement des personnes et une restriction du périmètre au 1er février 2023. En outre, la prolongation du passe sanitaire pour les voyages a été, elle aussi, encadrée : prolongation au-delà d'un mois par le législateur, consultation des élus locaux et des parlementaires concernés, régime juridique spécifique aux territoires d'outre-mer, incluant la possibilité, pour les élus, de demander son activation et sa désactivation. Grande avancée : le certificat de vaccination ne constituera plus un passe sanitaire ; seul un test négatif en tiendra lieu. Enfin, la voie de l'abrogation de l'obligation vaccinale est entrouverte si la HAS constate qu'elle n'est plus justifiée, ce à quoi elle s'est encore refusée hier.
Bien que nous regrettions l'absence d'inscription de la gratuité des tests dans le marbre de la loi, le groupe Socialistes et apparentés votera pour ce texte de compromis ,