Cette communication vise à attirer l'attention sur le retard pris par la signature de l'accord de coopération entre l'Union européenne et les États du groupe Afrique-Caraïbes-Pacifique, qui doit normalement succéder à l'accord de Cotonou, ainsi que sur les conséquences possibles de ce refus s'il persiste. Les négociations sur le nouvel accord ont été entamées le 28 septembre 2018 et ont abouti à un texte visant à moderniser l'actuel accord de Cotonou le 3 décembre 2020. Signé le 23 juin 2000 et devant expirer en février 2020, ce dernier régit le cadre institutionnel de la coopération entre les 79 États du groupe ACP, désormais regroupés au sein de l'Organisation des États ACP (OEACP).
La coopération entre l'Union européenne et l'OEACP comprend une dimension politique, avec des procédures de consultations et la mise en place d'institutions conjointes propres à ces régions. Les priorités sont la démocratie et les droits de l'homme, la croissance et le développement économique durable, le changement climatique, le développement humain et social, la paix et la sécurité, les migrations et la mobilité.
Le deuxième pilier a trait à la coopération au développement, dont le financement, qui reposait sur le Fonds européen de développement (FED), est fondé depuis le 14 juin 2023 sur l'Instrument de voisinage de coopération au développement et de coopération internationale (IVCDCI).
Enfin, la coopération économique et commerciale s'appuie sur les accords de partenariat économique (APE) régionaux qui existent indépendamment de ce dernier.
L'« accord de partenariat renouvelé et modernisé entre l'Union européenne et l'OEACP » modifie le cadre institutionnel de la coopération entre les deux parties avec l'insertion d'un socle commun et de trois protocoles régionaux correspondant respectivement à l'Afrique, aux Caraïbes et au Pacifique et mettant en cohérence avec les objectifs du développement durable (ODD), adoptés par l'Organisation des Nations Unies (ONU) en septembre 2015, ainsi que l'Accord de Paris sur le climat.
S'agissant du volet financier de la coopération, l'IVCDCI remplace le FED depuis le 14 juin 2021. À la différence de ce dernier, l'IVCDI couvre la coopération de l'Union européenne avec l'ensemble des pays tiers et non plus seulement les États ACP. En outre, il fait partie intégrante du budget communautaire alors que le FED était alimenté par les contributions volontaires des États membres.
L'entrée en vigueur de l'accord post-Cotonou, dit « accord de Samoa », est empêchée depuis le 20 mai 2021 par le refus de la Hongrie d'autoriser la signature de l'accord. Ce pays invoque des désaccords en matière de migration et de mobilité relatives aux questions de droits et de santé sexuelle et reproductive. Cette opposition a nécessité l'adoption de deux séries de mesures transitoires en plus des deux précédemment approuvées, afin de prolonger la validité de l'accord de Cotonou jusqu'au 30 juin 2023. Les demandes de la Hongrie semblent partiellement motivées par le souhait d'obtenir de l'Union européenne des concessions sur d'autres dossiers, notamment celui du versement des subventions européennes au titre du Fonds de cohésion.
J'attire votre attention sur le risque de fragilisation du partenariat entre l'Union européenne et l'ACP. Dans le cas où la Hongrie persisterait dans son opposition à l'accord, il conviendra d'envisager une cinquième série de mesures transitoires afin de prolonger à nouveau la validité de l'accord de Cotonou. Cela nécessiterait toutefois l'accord des États de l'OEACP, lequel pourrait impliquer l'adoption d'un calendrier précis. L'avenir de la coopération entre l'Union européenne et les États ACP dépend donc, à ce stade, du consentement de la Hongrie. Si cette situation de blocage devait perdurer, ses conséquences politiques et juridiques seraient importantes. D'une part, les procédures de dialogue politique prévues par les articles 2 et 8 n'auraient plus de cadre juridique et les procédures de consultation et d'adoption de mesures appropriées prévues par l'article 96 de l'accord de Cotonou seraient rendues inopérantes. En outre, les États ACP se trouveraient déliés des obligations contenues dans l'accord en matière de retours et de réadmissions, de droits de l'homme, de démocratie et de non-prolifération des armes de destruction massive. La Banque européenne d'investissement (BEI), dont les activités dans les États ACP obéissent à des règles qui figurent dans l'accord de Cotonou, devrait négocier des accords bilatéraux avec ces États. Plus généralement, l'affaiblissement du cadre politique UE-ACP représenterait une perte à la fois pour l'Europe et pour les pays des Caraïbes et du Pacifique, pour lesquels l'appartenance à l'OEACP représente un accès à l'Union européenne.
Enfin, la présidence suédoise a manifesté sa volonté de « s'efforcer de conclure les négociations de l'accord post-Cotonou qui a pour objectif de mettre en place un accord de partenariat moderne entre l'Union européenne et les pays ACP », et compte à cette fin sur l'appui de notre commission des affaires européennes et de celle des autres États membres.
Cette communication vise donc à mettre en évidence l'urgence de débloquer cette situation qui menace de remettre en cause une relation privilégiée et mutuellement bénéfique.