Je suis, vous le savez, une amoureuse des jeux vidéo, et vous ne m'entendrez pas critiquer à tout-va les outils numériques. Cependant, je reste moi aussi lucide à l'égard des dérives. Depuis six ans, la Macronie nous sert à toutes les sauces des solutions dématérialisées en lieu et place de services publics réellement humains. La fracture numérique a explosé, le droit à la déconnexion a volé en éclats, et le technococon, selon la belle expression d'Alain Damasio, s'est refermé sur nous. Par une naturelle imitation, ce sont maintenant nos enfants les premières victimes.
Dans ma circonscription, une association nommée Cap ou pas cap sensibilise les parents démunis face aux comportements addictifs de leurs enfants. Lors d'une conférence, Jennifer, maman de Riley, a apporté le témoignage suivant. En 2020, après la perte de son père, elle était plus fragile et a donc cédé facilement aux demandes de son fils. Les programmes à la télé se présentaient comme éducatifs, pédagogiques, et Jennifer pensait bien faire, elle ne se méfiait pas. Or à son entrée en maternelle, Riley ne parlait pas et ne comprenait pas quand on lui demandait de rapporter trois cubes. Géraldine, de même, s'est fait duper par la mention « tablette éducative à partir de 2 ans ». L'outil numérique a assuré l'alphabétisation de son fils, lui permettant de se délester de cette tâche pour en réaliser de nombreuses autres. Très vite, le fils de Géraldine a développé des troubles autistiques et ne communiquait plus. Ces mères sont en colère, et il y a de quoi.
La surexposition aux écrans va de pair avec la vulnérabilité sociale : les enfants de familles défavorisées passent en moyenne deux heures de plus par jour devant les écrans. La Macronie a laissé ces derniers envahir les écoles et les foyers. La boulimie capitaliste de la Start-up Nation, aveuglée par la marchandisation des temps de cerveau disponibles, n'a pas songé un instant à concevoir des garde-fous pour protéger les citoyens contre les nombreuses dérives. Il nous incombe maintenant de réparer les pots cassés.
Cette proposition de loi est un pansement. Tant qu'il y aura une répartition inégale des richesses et tant que les pouvoirs publics ne faciliteront pas la mobilité de tous nos concitoyens, aucune révolution ne sera possible.