. – Mon propos liminaire sera très bref et s'attachera essentiellement à resituer la période actuelle dans une vision historique des cinquante dernières années en matière de renforcement de l'infrastructure française d'expertise, de contrôle et de recherche liée au nucléaire.
Voici très exactement cinquante ans, a été décidée la création du premier service de l'État chargé d'exercer des missions de contrôle du nucléaire. Jusqu'en 1973, le contrôle était intégré au sein du Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). La décision du Premier ministre de l'époque, Pierre Messmer, de lancer un programme électronucléaire basé sur la conception américaine de réacteurs à eau sous pression a conduit à la création d'un service de l'État de taille relativement modeste, s'appuyant sur une expertise interne au CEA, distincte de sa responsabilité d'exploitant. Cet acte fondateur de création d'une entité de contrôle, puis de son renforcement, a ainsi été, dans notre histoire, lié à des décisions importantes, fortes, en matière de programme électronucléaire.
Au fil du temps, du développement du programme électronucléaire et de la survenue d'événements, dont certains dramatiques comme les accidents de Tchernobyl, Fukushima ou encore les événements d'Épinal en matière de radioprotection, les équipes chargées du contrôle, de l'expertise et de la recherche dans le domaine de la sûreté nucléaire et de la radioprotection se sont renforcées et consolidées pour y faire face.
Un besoin de structuration de cet ensemble s'est progressivement affirmé, notamment au début des années 2000 où a été décidée la création de l'IRSN, par l'externalisation de l'Institut de protection et de sûreté nucléaire (IPSN), jusqu'alors intégré au CEA, et sa fusion avec l'Office de protection contre les rayonnements ionisants (OPRI).
Un deuxième temps fort, lié à une décision ambitieuse en matière de développement nucléaire, concerne l'annonce simultanée par le président Jacques Chirac à l'occasion de ses vœux de 2006, du lancement du programme EPR et de la création de l'ASN, en tant qu'autorité administrative indépendante. Ainsi, le renforcement du contrôle indépendant de la sûreté a été associé à une décision du Gouvernement et du Parlement de développement d'un programme électronucléaire.
La circonstance dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui est assez similaire, avec, d'une part, une impulsion nouvelle en cours de discussion, qui doit encore être votée par le Parlement à la suite des différents débats et consultations organisés à cette fin, d'autre part, le souhait du Gouvernement de franchir une nouvelle étape visant à consolider l'ensemble du dispositif d'expertise, de contrôle et de recherche, dans le cadre d'une ligne directrice définie par le CPN, dont il convient dorénavant de débattre, dès lors que le Parlement votera les amendements nécessaires pour le réaliser.
Ainsi, à chaque grande étape en matière de développement du programme électronucléaire, des décisions sont prises concomitamment en termes de renforcement du contrôle, de l'expertise, de la recherche et de l'indépendance du dispositif. Ceci a eu lieu en 2006 avec la création de l'ASN. Un autre modèle pourrait aujourd'hui se mettre en place, inédit pour nous, mais connu dans le monde du nucléaire, puisque ce qui est proposé existe déjà dans de nombreux autres pays.