Je pense effectivement qu'il existe une immense hypocrisie sur la question du recours des plateformes à des travailleurs sans-papiers. Tout le monde connaissait cette réalité, non seulement les plateformes mais également la police et les services préfectoraux qui avaient choisi de fermer les yeux à ce sujet.
Selon vous, la circulaire Valls doit étendre les critères de régularisation par le travail à la relation commerciale des livreurs avec les plateformes.
Pour le moment, la logique de la loi immigration sera inverse, puisqu'elle prévoit, dans un de ses articles : « le statut d'entrepreneur individuel n'est pas accessible aux étrangers ressortissants de pays non membre de l'Union européenne ne disposant pas d'un titre de séjour les autorisant à exercer cette activité professionnelle ».
Pour l'instant, la volonté de la loi asile et immigration est d'empêcher toute régularisation des travailleurs des plateformes, sans doute pour remettre une main-d'œuvre corps et âme dans d'autres secteurs « sous tension », avec cette même logique de tirer les conditions vers le bas.
Vous estimez qu'il existe une certaine continuité en matière de cohérence libérale entre la loi Novelli et la création de l'Observatoire de l'ubérisation, jusqu'à la création de l'Arpe, ainsi que les tentatives de charte et d'amendement de différents textes législatifs. La volonté semble à chaque fois de défendre les intérêts des plateformes pour imposer l'exploitation du statut d'auto-entrepreneur et d'indépendant et ainsi contourner le code du travail.
Les décideurs publics tentent également, à travers la mise en place de l'Arpe, d'appliquer un « vernis démocratique » au dialogue social, qui viendrait valider une possibilité de non-retour pour couper court à toutes les procédures judiciaires engagées par des travailleurs contre les plateformes pour exiger une requalification en salarié.
Pouvez-vous revenir sur les différentes batailles que vous avez menées en matière de requalification ?
Par ailleurs, Getir fait partie du modèle qui s'est prétendu « socialement responsable » en ayant recours au salariat. Depuis, énormément de licenciements ont eu lieu, prétendument pour faute professionnelle. Vos organisations se sont-elles saisies de ces sujets ?
De son côté, Stuart a été rachetée par la Poste alors que cette entreprise était visée par une enquête pour travail illégal depuis 2015. Quelle est votre réaction à ce sujet et pensez-vous que notre commission d'enquête parlementaire devrait aussi entendre des représentants de Stuart et de la Poste ?