L'IRSN remplit ses missions, ainsi que l'ont constaté la Cour des comptes, le président de l'ASN et le HCERES. Ce projet de réforme n'est donc pas lié à une quelconque critique qui serait adressée à l'IRSN.
Le Gouvernement a décidé de faire évoluer l'organisation de la sûreté nucléaire. Je m'inscris dans cette logique. Séparer l'expert du décideur est le résultat d'une longue histoire qui commence avec Tchernobyl et se poursuit avec les grandes crises sanitaires des années 1990 – vache folle, sang contaminé. Elle conduit à considérer que, dans un modèle de gestion des risques efficace, il faut séparer la décision de l'expertise. C'est une exigence que la Haute Autorité de santé rappelle dès l'entame de son dernier rapport annuel d'analyse prospective. Dans le futur système, il sera donc très important de maintenir une distinction nette entre l'expertise et la décision, surtout si elles relèvent de la même organisation. Au sein de la NRC, les modalités de l'interaction entre l'organe décisionnel et les experts sont clairement formalisées.
Par ailleurs, nous avons beaucoup insisté sur l'indispensable combinaison entre l'expertise et la recherche, qui s'alimentent mutuellement. Il s'agit en effet d'une recherche orientée, qui constitue un facteur d'attractivité. L'expérience a montré que certains sujets de sûreté avaient été mieux traités parce que la recherche s'y était intéressée.
Enfin, le maintien des compétences est un enjeu important. La relance du nucléaire entraînera une charge d'expertise très importante pour l'IRSN, alors que certains dossiers sont déjà en cours concernant l'EPR, la prolongation d'exploitation ou encore le stockage. L'IRSN a démontré sa réactivité et sa capacité à anticiper concernant la prolongation d'exploitation des réacteurs de 900 mégawatts au-delà de quarante ans ou la gestion de l'accident de Fukushima.
Dans les semaines et les mois qui viennent, en ma qualité de dirigeant et dans le respect de la feuille de route qui m'est confiée, je serai donc particulièrement attentif à ces trois sujets : préserver les compétences scientifiques et techniques, assurer la séparation entre l'expert et le décideur, et soutenir d'une manière ou d'une autre la pérennité de la combinaison entre expertise et recherche.