Ce n'est pas un cas isolé, ni en maison centrale ni dans les autres établissements pénitentiaires. Des détenus sont classés malgré des faits de violence, des insultes ou des menaces envers le personnel de surveillance, ceci pour acheter la paix sociale. Ils peuvent même se transformer en petits trafiquants dans le cadre de leur détention. Ce n'est pas un cas isolé : c'est le cas dans la majorité des établissements pénitentiaires. C'est également pour cela que l'on parle de perte d'identité. Comment pensez-vous qu'un surveillant va réagir lorsqu'il constate qu'une personne qu'il a signalée est classée « auxi » ? Ce sont toujours les mêmes qui posent problème – une minorité de détenus – mais ils sont classés et même privilégiés par rapport à ceux qui font leur peine normalement, pour acheter la paix sociale. À un moment, ça ne fonctionne plus.
Un dernier exemple relatif à la maison d'arrêt du Mans, où je suis affecté. Un contrat avait été passé avec Ouest France, qui offrait le journal tous les matins à toutes les prisons du Grand Ouest, pour les personnes détenues. Or depuis deux ans environ, nous avons été confrontés à plusieurs problèmes. Un grand procès s'est récemment tenu devant les assises de la Sarthe. La semaine dernière, nous avons dû procéder à deux extractions de détenus qui s'étaient fait rouer de coups par d'autres après que leur nom est apparu dans la presse, suite à leur condamnation pour des faits très graves. L'un d'entre eux a subi un tabassage pendant le service de nuit – nous avons frôlé le drame – et le second dans la cour ; cela s'est produit parce qu'on a distribué des journaux à des personnes détenues. Le droit à l'information bénéficie évidemment aux détenus, mais ils disposent notamment de télévisions pour s'informer. C'est maintenant l'administration pénitentiaire qui paie des journaux pour les détenus, et cela nous revient en boomerang lorsqu'il faut extraire des détenus dont le nom est paru dans la presse. C'est inadmissible.