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Intervention de Joseph Paoli

Réunion du mercredi 15 février 2023 à 14h30
Commission d'enquête chargée de faire la lumière sur les dysfonctionnements au sein de l'administration pénitentiaire et de l'appareil judiciaire ayant conduit à l'assassinat d'un détenu le 2 mars 2022 à la maison centrale d'arles

Joseph Paoli, secrétaire général national adjoint du Syndicat pénitentiaire des surveillants non gradés (SPS) :

J'ai tout d'abord une pensée pour Yvan Colonna et le peuple corse. On ne va pas en prison pour mourir, mais pour purger sa peine et payer ce que l'on doit à la société. Je vais me recentrer sur cette affaire. J'ai un sentiment à la fois de colère et de lassitude par rapport au laxisme et à ce qui a été fait depuis les attentats de 2015. Nous nous sommes aperçus depuis que les terroristes faisaient un passage en prison. Mais malgré les commissions d'enquête – celle de M. Ciotti en 2015 sur les filières djihadistes –, les lois – sur le renseignement, en mai 2015, renforçant la lutte contre le terrorisme, en mai 2016 –, et, enfin, l'excellent rapport du 12 janvier 2022 de M. Philippe Benassaya sur les dysfonctionnements de la politique pénitentiaire, ce qui s'est passé à Arles peut malheureusement se produire ailleurs.

Nous parlons de dysfonctionnements en matière de prise en charge de détenus spécifiques. Deux mondes coexistent : celui de la direction, qui a une gestion humaniste des détenus, et celui des personnels de surveillance, qui font de la sécurité. Or ceux qui font de la sécurité ne sont pas assez écoutés. Nous remontons des renseignements, mais ne sommes pas écoutés. Un collègue travaillant au sein de la maison centrale nous disait ceci : « Une fois passée la porte, on nous prend pour des enfants. » Les informations sur les détenus spécifiques qui demandent de l'attention, notamment les DPS, ne sont pas prises en compte. Alors que les surveillants sont acteurs, la direction les considère plutôt comme des figurants. Un de mes collègues a rapporté qu'un changement d'attitude avait été constaté chez Franck Elong Abé après la prise de Kaboul en août 2021. Ainsi, les personnels des équipes locales d'appui et de contrôle (Elac) d'Arles ont constaté un changement dans le comportement et la tenue vestimentaire durant plus de quinze jours. Je n'ai pas retrouvé cette information dans le rapport d'inspection, alors qu'il revêt pourtant une certaine importance. C'est un élément extrêmement important au regard des commissions disciplinaires uniques (CPU) dangerosité, afin de demander un placement en quartier d'évaluation de la radicalisation (QER). Je ne sais pas pourquoi le renseignement n'a pas été pris en compte. C'est déplorable.

Je le répète : il y a deux mondes. La direction n'a pas la culture de la sécurité. Elle gère au jour le jour. Elle cherche peut-être à transformer des gens violents en moutons, ou à ne rien faire... Quoi qu'il en soit, le profil de Franck Elong Abé n'a pas été pris sérieusement en compte. Cela se passe ailleurs également. Une commission d'enquête a été créée car il s'agit d'Yvan Colonna. Je m'interroge : si cela avait été quelqu'un d'autre, y aurait-il eu une commission d'enquête ? Peut-être pas.

Cinq mois après les faits, un autre drame a été évité dans ce même établissement, mais mon collègue en parlera, car il a pris contact avec des personnes qui sont intervenues à Arles. Si les faits sont avérés c'est déplorable, cinq mois après ce qui s'est passé dans la salle de sport.

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