Le projet de loi porte sur deux textes, déjà adoptés par la commission économique pour l'Europe des Nations Unies (CEE-ONU) : le premier amendement à la Convention sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière, dite convention d'Espoo de février 1991 – la longueur du délai, que l'on retrouve pour d'autres textes de nature environnementale, pose évidemment question –, ainsi que le protocole à cette convention, relatif à l'évaluation stratégique environnementale, dit protocole de Kiev.
La France a signé ces deux textes le 25 juin 2001 et le 21 mai 2003 : ils sont présentés au Parlement respectivement vingt-deux et vingt ans après leur signature. Ce retard, aucunement justifié, marginalise la France : en effet, le premier amendement à la convention d'Espoo et le protocole de Kiev ont déjà été ratifiés respectivement par trente-quatre et trente-deux États, ainsi que par l'Union européenne. Si l'environnement est réellement une priorité pour notre pays, alors nous devons approuver ou ratifier beaucoup plus rapidement les accords et les traités qui portent sur cette matière : la France doit se montrer exemplaire dans ce domaine. Or trois autres conventions internationales sur l'environnement, deux signées en 1995 et une en 2011, n'ont toujours pas été approuvées par notre pays.
La convention d'Espoo prévoit la conduite d'une évaluation de l'impact sur l'environnement pour certaines activités à risque et la notification aux parties pouvant être concernées. Un État frontalier doit notifier à ses voisins tout projet majeur à l'étude si celui-ci est susceptible de causer des préjudices transfrontaliers importants ; les parties doivent ensuite se consulter pour réduire ou éliminer ces impacts.
Le premier amendement à la convention d'Espoo, adopté en 2001 et entré en vigueur en 2014, est composé d'un unique article qui modifie la convention en deux points. Il précise tout d'abord la notion de public qui doit être informé et qui peut formuler des observations ou des objections aux projets concernés pour y inclure les associations et les organisations non gouvernementales (ONG) : il s'agit d'une réelle avancée pour mieux intégrer la société civile. Il ouvre ensuite l'adhésion à la convention à des États tiers à la CEE-ONU : ce point est intéressant car, si le Brésil et le Suriname, deux pays frontaliers de la Guyane française, décidaient de rejoindre la convention, il serait possible de modifier des projets ayant de forts impacts sur l'environnement ; néanmoins, aucun État non membre de la CEE-ONU n'a encore manifesté sa volonté de rejoindre le cadre de la convention d'Espoo et ses textes dérivés.
Le protocole de Kiev relatif à l'évaluation stratégique environnementale, adopté en 2003 et entré en vigueur en 2010, est composé d'un préambule, de vingt-six articles et de cinq annexes. Il prévoit un dispositif d'évaluation des effets sur l'environnement et sur la santé de certains plans et programmes. Un rapport environnemental doit être élaboré et un processus de consultation et de participation du public doit être mis en œuvre : là encore, on améliore les procédures de démocratie environnementale. Contrairement à la convention d'Espoo, le protocole de Kiev ne s'inscrit pas uniquement dans un cadre transfrontalier même si son article 10 en prévoit la possibilité.
Ces deux textes représentent néanmoins un enjeu limité aujourd'hui puisque la transposition de directives les a presque complètement intégrés dans le code de l'environnement. Leur approbation est donc avant tout symbolique, même si elle peut inciter les autres États qui les ont signés sans les ratifier à engager à leur tour les procédures internes nécessaires : sont concernés, pour le premier amendement, l'Arménie, la Belgique, la Macédoine du Nord et le Royaume-Uni ; pour le protocole de Kiev, la Belgique, la Géorgie, la Grèce, l'Irlande et le Royaume-Uni.
Enfin, j'ai soulevé une question importante auprès du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et du ministère délégué aux outre-mer, qui touche à la réserve de la Polynésie française. Le Gouvernement avait initialement déclaré que ni le premier amendement, ni le protocole de Kiev ne s'appliqueraient aux territoires de la Polynésie française. Il indiquait suivre l'avis défavorable émis par l'Assemblée de Polynésie française, le 29 octobre 1998, sur la convention d'Espoo. Compte tenu du délai écoulé depuis la consultation de 1998 et surtout depuis la ratification de la convention par la France en 2001, il apparaîtrait normal de consulter à nouveau la Polynésie française sur les textes dérivés de cette convention, présenté aujourd'hui au Parlement. À la suite de ma demande, le ministère délégué aux outre-mer s'est engagé à conduire une nouvelle consultation, ce dont je me réjouis. En fonction de la réponse qu'apportera la Polynésie, le Gouvernement pourra éventuellement décider de lever cette réserve.
En conclusion, si ce projet de loi présente peu d'enjeux sur le fond, il offre l'occasion de rappeler la nécessité d'accélérer les procédures de ratification des engagements internationaux de la France en matière environnementale et de consulter dès que possible les territoires ultramarins.
Mes chers collègues, je vous invite à voter en faveur de l'approbation du premier amendement à la convention d'Espoo et du protocole de Kiev.