C'est d'ailleurs Christine Lavarde, sénatrice Les Républicains, qui parle le mieux de cette proposition : elle la juge infaisable, inadaptée et trop coûteuse. J'espère que la raison l'emportera. Si nous avions 50 milliards à dépenser, je préférerais qu'on les investisse dans le nucléaire ou les énergies renouvelables plutôt que de s'en servir pour financer du pétrole fourni par la Russie ou les pays du Golfe ; ce serait de l'argent mal placé.
Monsieur Laqhila, l'indemnité carburant sera ciblée sur les travailleurs modestes obligés de prendre leur voiture pour aller travailler. Elle représentera en moyenne 25 centimes par litre.
Madame Magnier, nous avons effectivement prévu que cette indemnité carburant s'applique aux travailleurs jusqu'au cinquième décile de revenu, c'est-à-dire jusqu'à un revenu fiscal de référence de 14 000 euros. La Première ministre a été très claire, hier, à propos de l'esprit d'ouverture et de compromis du Gouvernement – et je me réjouis de nouveau de la qualité de nos débats. Il appartient à la représentation nationale d'évaluer si le cinquième décile est le niveau approprié, ou s'il faut aller un peu au-delà, considérant que les classes moyennes ne sont pas suffisamment concernées par la mesure, ou s'il faut, au contraire, faire davantage pour moins de bénéficiaires. C'est un beau débat politique. Je pense que notre proposition est juste et cohérente, mais je ne vous dis pas que nous n'en bougerons pas. Les parlementaires peuvent évidemment améliorer les propositions du Gouvernement.
Madame Pires Beaune, 10 % de la dette publique française est indexée sur l'inflation, comme c'est le cas dans tous les pays de l'OCDE, sans exception. Cela correspond tout simplement au souhait de certains investisseurs. Les assureurs, par exemple, demandent que les parts d'obligations assimilables du Trésor (OAT) qu'ils acquièrent soient indexées sur l'inflation, afin de préserver la valeur des assurances vie. Le recours à ces produits est donc un moyen de garantir le bon financement de notre dette.
Je laisse le soin au ministre délégué chargé des comptes publics de répondre à toutes les questions que vous avez légitimement posées au sujet de la contribution à l'audiovisuel public.
S'agissant de la CVAE, je veux être très clair. En premier lieu, nous sommes déterminés à baisser les impôts de production et à supprimer la CVAE, dont le produit s'élève à 8 milliards d'euros, dans le projet de loi de finances pour 2023. La reconquête industrielle est pour moi une priorité absolue et je considère que c'est un levier important pour relocaliser des productions industrielles dans notre pays. En second lieu, nous voulons discuter des modalités de mise en œuvre avec les collectivités locales, notamment les grandes métropoles et les régions. Je comprends les inquiétudes, et il faut y répondre.
Concernant les crédits pour la rénovation énergétique, nous avons prévu 2 milliards d'euros dans la LFI pour 2022. L'exécution est très dynamique, vous avez raison. C'est pourquoi nous ouvrons 400 millions d'euros supplémentaires dans le PLFR. Ce sont vraiment des crédits utiles, et même nécessaires, qui méritent toute notre attention.
S'agissant du GNR, je comprends parfaitement qu'on puisse regretter le report qui est prévu, mais j'ai eu de multiples discussions avec de très petites entreprises des secteurs du transport et du bâtiment et je peux vous dire que la suppression de cet avantage fiscal serait tout simplement insupportable financièrement pour elles : cela effacerait toutes les marges et risquerait de conduire à beaucoup de dégâts sur le plan social. Je ne prétends pas que ce report soit ma décision préférée, mais une question d'acceptabilité économique et sociale se pose pour beaucoup de très petites entreprises.
En ce qui concerne les salaires, je crois avoir déjà répondu. Tous les dispositifs d'intéressement et de participation doivent être utilisés, de même que la prime PEPA.
Monsieur de Courson, je n'ai pas mis cinq ans à m'apercevoir que la cote d'alerte était atteinte et qu'il fallait gérer les finances publiques avec sérieux. Je rappelle que nous avons sorti la France de la procédure de déficit excessif, contrairement à d'autres majorités. Nous sommes revenus, dès 2018, sous le seuil de 3 % de déficit budgétaire. Le quinquennat a ensuite été affecté par la crise des gilets jaunes, puis par la crise économique la plus grave depuis 1929. Celle-ci nous a amenés à protéger les entreprises, les salariés mais aussi les finances publiques dans le cadre du « quoi qu'il en coûte ». Toutes les évaluations de l'OCDE, du FMI et de l'INSEE montrent que nous aurions un niveau de dette publique plus élevé, de 12 ou 14 points, si nous avions laissé une catastrophe sociale et économique se produire dans notre pays.
La dette publique est-elle soutenable ? De fait, oui ; ne cédons pas à la panique. Elle est soutenable puisque nous finançons notre dette à des taux d'intérêt certes plus élevés mais qui restent raisonnables et que notre spread demeure contenu. Faut-il continuer dans la même direction ? Certainement pas. Nous devons réduire la dette publique pour éviter d'être confrontés à des problèmes de financement. Ma responsabilité première en tant que ministre des finances est de garantir que nous pouvons financer correctement la dette publique, que nous la réduisons – c'est une question d'indépendance et de souveraineté – et que nous poursuivons la baisse des déficits pour atteindre les 3 % en 2027. Faut-il, afin d'y parvenir, réduire les dépenses publiques ? Certainement. Néanmoins, ce n'est pas la seule solution, et je ne crois absolument pas à l'austérité, qui serait particulièrement malvenue aujourd'hui. Je considère que la meilleure manière de revenir à des finances publiques saines est le plein emploi, mais le plein emploi seul et la croissance seule ne suffisent pas. Il faut aussi réduire un certain nombre de dépenses publiques. Des députés m'ont proposé de travailler sur ce sujet en prévision du projet de loi de finances pour 2023 : cette initiative, de Daniel Labaronne, me semble particulièrement bienvenue.
Concernant les prélèvements obligatoires, le ratio augmente en effet, tout simplement parce que la richesse nationale a diminué, la croissance ayant été plus faible ces derniers mois. Je rappelle toutefois que nous avons réduit les impôts de 50 milliards d'euros au cours du quinquennat précédent. C'était la plus forte baisse d'impôts depuis plusieurs décennies dans notre pays.
J'en viens au déficit structurel. Je rappelle que nous avons droit, dans le cadre de la révision du bras préventif du pacte de stabilité et de croissance, à une déviation de 0,6 point par an, soit 1,2 point sur deux ans. L'écart par rapport à la norme européenne, à savoir 0,5 point de PIB, est donc de 0,7 point, sur deux ans, soit 0,35 point par an. C'est à peu près ce à quoi nous parvenons aujourd'hui – pas tout à fait, mais à peu près. Vous le verrez lorsque vous examinerez le programme de stabilité. Je confirme que nos marges de manœuvre, si nous voulons rester dans les clous européens, sont effectivement réduites, ce qui nous amène à faire attention à chaque euro.