Nous voilà au terme de la deuxième étape de l'examen d'un texte fondamental issu d'une initiative parlementaire et, surtout, transpartisane. Son principal objectif est la défense des intérêts des parties les plus vulnérables. Au-delà des sensibilités politiques, ce dessein est l'affaire de tous : l'adoption du texte à l'unanimité en commission des lois révèle, fort heureusement, qu'il nous est – comme il le doit – bel et bien commun. C'est dans cet esprit que nos réflexions à venir doivent s'inscrire.
Je tiens à saluer le travail extraordinaire commencé sous la précédente législature déjà par Laurence Vichnievsky et Philippe Gosselin. Le rapport de leur mission d'information sur le bilan et les perspectives des actions de groupe dressait un bilan clair de la procédure instaurée en 2014. Il présentait un fin diagnostic du dispositif, mais également des solutions claires et ambitieuses pour l'améliorer. Car rappelons-le : avec seulement une petite trentaine d'actions de groupe répertoriées, le bilan de cet outil était, et demeure, décevant.
Face à ce constat, vous vous êtes employés à nous proposer un nouveau régime, présenté dans un texte clair et cohérent. Issu d'une large concertation, celui-ci formalise les différentes préconisations qui avaient été émises par la mission parlementaire.
Par ailleurs, le groupe Démocrate salue l'initiative de la présidente de l'Assemblée nationale : en décidant de saisir pour avis le Conseil d'État, elle a renforcé l'importance de ce travail d'initiative parlementaire et permis au texte d'atteindre un haut degré d'expertise – plusieurs amendements rédactionnels déposés en commission pour en affiner la rédaction étaient en effet directement issus de l'avis du Conseil.
Néanmoins, comme en commission, nous émettrons au cours du débat plusieurs réserves, en particulier s'agissant de l'élargissement de la qualité à agir, qui semble inquiéter de nombreux acteurs.
Le principal changement que vous souhaitez opérer vise à regrouper au sein d'une nouvelle loi-cadre l'ensemble des procédures d'action de groupe applicables dans différents secteurs d'activité, qui figurent actuellement dans des textes épars. Cette nouvelle loi d'orientation va d'ailleurs au-delà de la simple réunion des procédures existantes, puisqu'elle a vocation à proposer une nouvelle méthode universelle de résolution des litiges qui, hors du champ pénal, regroupent une pluralité de victimes.
Sur le fond, les principales avancées proposées par le texte sont l'extension à un plus grand nombre d'associations de la qualité pour agir, l'ouverture de la procédure aux personnes morales de droit privé et de droit public, la réparation de l'intégralité du préjudice subi par les victimes, la suppression de l'étape procédurale de mise en demeure, la création d'une sanction civile en cas de comportement dolosif du professionnel – mesure tout à fait novatrice – et l'allègement des charges du procès incombant normalement au demandeur.
Ainsi, l'esprit de la proposition de loi consiste à améliorer, à simplifier les textes existants, plutôt que de renverser la table en s'inspirant du modèle américain des class actions. Le but de ses auteurs, que nous partageons aisément, est clair : faciliter l'accès à cette procédure sans risquer de déstabiliser les acteurs économiques, en particulier les petites et moyennes entreprises. De grâce, gardons-nous donc de dévitaliser ce texte majeur au motif que d'aucuns, surtout s'agissant de santé ou de droit du travail, le verraient d'un mauvais œil ! L'action de groupe n'est qu'un outil parmi tant d'autres – je pense notamment aux procédures collectives qui peuvent être utilisées dans certains secteurs. Nous devons garantir à nos concitoyens que sera respecté l'objectif du texte : l'équilibre des forces en présence. L'élargissement de la qualité à agir peut certes effrayer, voire emporter des risques ; nous n'en devons pas moins les assumer, car tout l'avantage du texte réside dans la préservation des intérêts des plus vulnérables. Les rapporteurs ont également écarté le système de l'opt-out, qui présume de l'adhésion d'une personne physique ou morale à une action de groupe déjà engagée et susceptible de la concerner, à moins d'un refus exprès de sa part : l'adhésion volontaire, clairement exprimée, restera la règle.
Pour toutes ces raisons, cette proposition de loi équilibrée permettra à nombre de nos concitoyens d'unir leurs forces afin de se faire entendre de la justice au sujet d'une même cause. Le groupe Démocrate votera sans réserve en sa faveur, ainsi qu'en faveur des amendements déposés par les rapporteurs, qui vont dans le bon sens.