Madame Riotton, vous avez demandé comment lutter efficacement contre la haine en ligne et avez déposé un amendement auquel je donnerai un avis favorable. La loi ne peut pas tout dire. Elle doit fixer des caps et des limites, apporter des précisions mais les politiques publiques doivent consentir des efforts en matière de prévention et d'éducation en milieu scolaire. À ce sujet, je rappelle que l'exposition aux écrans commence parfois à l'école, quand l'enfant se retrouve pour la première fois face à une tablette. La lutte contre la haine en ligne est aussi une question d'éducation et nous en revenons à la responsabilité parentale, qui me semble essentielle. Le cœur de cette PPL consiste à mettre les parents au centre du dispositif.
Lutter contre la haine en ligne passe aussi par la création de mécanismes de sanction, qu'il faut faire respecter. Des questions de délais de réponse se posent en matière de saisine des autorités. À cet égard, j'ai placé le curseur sur 48 heures, prenant en considération l'existence d'autres priorités comme les faits de terrorisme, qui nécessitent des délais plus brefs. Par ailleurs, il existe des différences en matière de délai entre enquête de flagrance, information judiciaire ou instruction.
Pour lutter contre la haine en ligne, il faut nous doter d'outils qui résident non seulement dans la loi mais aussi dans les pratiques, dans les politiques publiques et dans l'éveil des consciences. Ce texte a pour objectif de communiquer le plus possible afin d'éveiller davantage les consciences sur les dangers des réseaux sociaux et les réponses qu'on peut y apporter.
Des lois ont déjà été adoptées et cette PPL constitue une brique, qui n'a pas vocation à régler seule le problème. Aujourd'hui, vous m'accompagnez pour améliorer ce texte et, demain, d'autres initiatives verront le jour car le domaine dont nous parlons ici est en mouvement permanent. Il n'y aura pas de recettes miracles, mais il nous faut rappeler certains principes et valeurs et c'est aussi l'enjeu d'une niche parlementaire que de leur donner corps à travers une PPL.
Oui, il faut trouver un juste équilibre entre le droit parental et l'obligation, et ce juste équilibre doit se retrouver dans l'articulation du texte de loi.
Madame Amiot, les parlementaires n'ont pas le temps de se pencher sur le détail des questions techniques à l'occasion de l'examen d'une PPL dans le cadre d'une niche parlementaire. De plus, des avancées ont lieu en ce moment, notamment autour d'un texte sur l'accès à la pornographie ; des réponses devraient nous parvenir rapidement. Cependant, les principes, tels que l'âge d'accès, doivent être fixés dans le marbre de la loi. Laissons les organismes de contrôle se charger des modalités techniques car ils sont les mieux placés pour le faire. Le décret du Conseil d'État viendra ensuite compléter cette procédure.
La législation abondante que vous mentionnez, madame Genevard, signale bien l'importance que ce sujet occupe dans nos vies. J'ignore ce que deviendra cette PPL mais je voudrais faire avancer le sujet dans les esprits, saisir les consciences, rappeler certains principes et valeurs de limitation, de responsabilisation et d'information. Dans les années à venir, j'espère que notre arsenal législatif ne sera pas constitué de lois trop nombreuses et trop bavardes parce qu'au-delà de la question que nous évoquons aujourd'hui, la multiplication des textes législatifs représente un sujet politique majeur dans notre pays.
Madame Colboc, en ce qui concerne l'article 4, un amendement déposé pose la question de l'élargissement du champ du rapport dont la réalisation devrait être confiée au Gouvernement. J'ai voulu qu'il se concentre sur les réseaux sociaux. Cependant, j'ai reçu d'autres opérateurs importants comme YouTube et nous pourrions aussi nous interroger sur l'impact des messageries.
Il faut assurer la protection des enfants, madame Melchior, et la loi seule ne peut s'en charger. Il s'agit aussi d'une œuvre humaine, qui doit se poursuivre en dehors des textes, dans les écoles, les maisons et les familles. Il s'agit d'une question de société. Cette protection peut aussi être technique et nous pouvons demander aux opérateurs de renforcer les mécanismes d'appel à l'aide. Des progrès ont été réalisés ces dernières années en matière de signalement. Toutefois, les signalements doivent être suivis d'effets. Il faut également rappeler aux parents à quel point ce qui se passe tout près d'eux peut être décisif et grave. Un enfant peut être dans la même pièce que ses parents et faire avec son smartphone des choses dont ces derniers n'ont aucune idée. Cette sensibilisation est cruciale.
J'en viens à la question de l'âge. Des amendements ont été déposés. L'âge de 15 ans revient dans les conventions que nous avons passées et il correspond à la majorité sexuelle. Certes, d'autres majorités existent, celle de 18 ans bien sûr, mais aussi celle de 16 ans, âge auquel les jeunes peuvent commencer la conduite accompagnée par exemple. Mais il ne faudrait pas donner l'impression d'infantiliser les jeunes. L'âge de 15 ans est médian et correspond à l'entrée au lycée. Je reviendrai sur ce choix lorsque nous débattrons des amendements.
Quant aux techniques de contrôle, elles nous échappent et j'ai donc pris la décision de renvoyer cette question au Conseil d'État, comme celle des fournisseurs accès.
En ce qui concerne l'efficacité de la loi sur le cyberharcèlement, madame Anthoine, je n'ai pas accès à une évaluation complète de nos politiques publiques en fonction de notre arsenal législatif. Néanmoins, j'ai auditionné des associations et des responsables du secteur. J'observe des progrès et nous sommes sortis du no man's land dans lequel nous nous trouvions, mais de nombreux efforts restent à fournir.
Enfin, en matière de responsabilisation des acteurs, malheureusement, seule la peur de la sanction fait la différence. Il nous faut donc nous doter des moyens de faire respecter un minimum de règles et de nous assurer que l'absence du respect de ces règles vaudra bien sanction.