Il n'est pas simple de trouver la bonne recette pour protéger les enfants des dangers du numérique. Quel niveau de liberté leur accorder ? À quel point faut-il les encadrer pour assurer leur sécurité ? Qui doit prendre ces décisions ? Nos réflexions en la matière se poursuivront bien après l'examen de ce texte et bien au-delà de cette législature. Néanmoins, il est bienvenu que notre commission puisse débattre de ces questions.
Il faut distinguer la philosophie du texte et la capacité à appliquer les mesures proposées pour qu'elles produisent les effets escomptés. En ce qui concerne la philosophie, monsieur le rapporteur, vous indiquez que cette PPL pourrait représenter une avancée concrète, à même de faire reculer le cyberharcèlement entre jeunes, tout en mentionnant les nombreux risques auxquels les réseaux sociaux les exposent. En fait, ce texte ne semble pas tant se concentrer sur la lutte contre la haine en ligne que sur la question du juste niveau de la protection des mineurs sur internet.
En revanche, la question de la responsabilité des entreprises impliquées apparait beaucoup plus clairement. À cet égard, nous partageons votre volonté : il faut affirmer de manière positive dans notre droit les règles régissant l'usage des réseaux sociaux et redonner aux parents, dans le processus d'inscription, la place qu'ils devraient occuper, afin que les enfants puissent découvrir ces outils de façon plus sereine. Nous partageons aussi la volonté d'encadrer plus fermement les réseaux sociaux pour qu'ils respectent les dispositions qui les concernent.
J'en viens à la question de l'âge, qui va certainement nourrir les débats autour de ce texte. « La majorité numérique pour les réseaux sociaux est actuellement de 13 ans » : cette phrase tirée d'un article de presse récent reflète une idée presque communément admise et pourtant fausse. Cet âge plancher vient de la loi américaine Coppa (Children's Online Privacy Protection Act) et n'a aucune existence en droit français. Il est incontournable de redonner à la majorité numérique déjà établie à 15 ans un cadre juridique lui permettant d'être correctement appliquée. À ce titre, nous sommes opposés à toute modification de cet âge dans le texte actuel.
En ce qui concerne les enjeux techniques, il n'aura échappé à personne que la solution envisagée n'existe pas encore. Nous aurons beau voter la PPL, la question restera entière, d'autant que nous avons besoin de deux solutions techniques. La première permettra de contrôler l'âge de tous les utilisateurs et la seconde de collecter le consentement du titulaire de l'autorité parentale.
Aux doutes concernant notre capacité à développer ces dispositifs techniques s'ajoutent des inquiétudes quant à la quantité de données collectées lors de ces vérifications. Le principe de minimisation de la Cnil enjoignant à limiter la collecte des données au strict nécessaire, la vérification du consentement des parents posera un défi de taille.
Enfin, des solutions similaires doivent être utilisées pour l'ensemble des acteurs et cela représente le plus grand défi auquel nous sommes confrontés à ce sujet. À cet égard, nous saluons l'amendement du rapporteur visant à réécrire l'article 2, afin de donner mandat à l'Arcom pour la certification des solutions identifiées.
Bien que ces questions techniques restent encore sans réponse, le groupe Écologiste partage la volonté du rapporteur de renforcer notre arsenal législatif. Pour que la protection des mineurs sur internet prévue par le RGPD soit enfin effective – particulièrement en matière de réseaux sociaux –, nous sommes favorables à ce texte qui vise à protéger les enfants en incitant au dialogue sur les usages numériques. Néanmoins, nous alertons sur le fait qu'une solution technologique ne saurait suffire à répondre à des questions si complexes. Nous vous invitons à considérer des mesures visant à renforcer l'apprentissage des bonnes pratiques numériques lors de l'examen en séance.