L'outre-mer, nouveau territoire perdu de la République : c'est en ces termes que Marine Le Pen résumait dans son projet présidentiel les conséquences pour nos départements et collectivités ultramarins de près de quinze ans d'abandon par les gouvernements successifs.
L'insuffisance du pouvoir d'achat dans ces territoires apparaît comme un problème brûlant auquel il est urgent de répondre. Comme le rappelle l'exposé des motifs de la présente proposition de résolution, l'écart de niveau de vie entre les départements et régions d'outre-mer et la métropole est considérable, avec un revenu médian à 17 000 euros dans les territoires ultramarins contre 22 000 euros en France métropolitaine. Il apparaît ainsi plus qu'opportun qu'une commission d'enquête consacrée à ce problème en auditionne les protagonistes, afin que soit apportée une réponse précise sur la question, ses causes et les solutions envisageables.
Nous souscrivons pleinement au diagnostic de sous-investissement et de moindre qualité des services publics établi dans ce texte. C'est une véritable politique d'abandon qui doit être dénoncée et renversée. Les Drom font pleinement partie de la France et méritent d'être traités par l'État central à égalité avec les autres territoires, toutes les fois que leurs particularités géographiques n'imposent pas d'en faire autrement. Nous appelons ainsi une réforme de la péréquation nationale pour rétablir cette égalité sciemment rompue.
Un point suscite cependant mon étonnement. La réduction de l'abattement sur l'impôt sur le revenu dans les Drom est mentionnée comme une cause de la perte de pouvoir d'achat pour leurs habitants. Il y avait pourtant pour l'exercice 2020, 31 % de foyers assujettis à l'impôt sur le revenu en Martinique, 28 % en Guadeloupe, 27 % à La Réunion, 15 % à Mayotte. Ce sont de loin les cinq départements français qui comptent le plus faible pourcentage de foyers redevables de cet impôt. Ainsi, la fin de cet abattement n'a pu être un facteur de perte de pouvoir d'achat que pour le quart le plus aisé de la population de ces départements. Il est en un certain sens étonnant que ce texte du groupe Socialistes et apparentés encourage un tel cadeau fiscal, selon une terminologie prisée à gauche. Ce n'est vraisemblablement pas l'axe à exploiter prioritairement si notre objectif est d'agir en faveur des conditions de vie des plus modestes.
S'agissant de l'octroi de mer, dont la vocation est de protéger la production agricole, artisanale et industrielle des départements d'outre-mer, il constitue également une source majeure de recettes pour ces collectivités territoriales. Sa suppression au profit d'une TVA à 20 % serait une décision catastrophique. Pour notre part, nous soutenons une réforme de l'octroi, afin d'en exclure les biens produits en France ou en Union européenne qui n'entreraient en concurrence avec aucun bien produit dans les cinq départements d'outre-mer. Il remplirait ainsi sa fonction de protection de la production ultramarine, sans entraîner de dégradation excessive du pouvoir d'achat des habitants.
Ce texte soulève une autre question : pourquoi réserver la compétence de la commission d'enquête aux seuls départements et régions d'outre-mer, alors que beaucoup des problèmes abordés peuvent se poser en des termes similaires dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle Calédonie ?
En dépit de ces quelques remarques, nous soutiendrons cette proposition de résolution. Nous souhaitons ardemment que la future commission d'enquête traite la question de manière complète, claire et franche, et qu'une réponse soit apportée à toutes les questions que nous poserons. La dignité de nos concitoyens d'outre-mer le mérite.