L'influence est assez différente de l'ingérence : elle relève de la séduction et ne s'accompagne pas d'une volonté de nuisance.
Il est des stratégies que nous n'avons pas vu venir. Ainsi, la Russie a exploité une certaine image des conflits au sein de nos démocraties, qu'elle a intégrée dans un récit que nous n'avons pas su maîtriser. L'explicitation n'étant pas dans notre culture, nous essayons de calmer les choses sans rappeler nécessairement quels sont les piliers de la démocratie ; or celle-ci consiste justement en une mise en scène des conflits, que l'on résout par le mécanisme de la représentation. C'est ainsi que la Russie s'est ingérée dans nos affaires et a détérioré l'image de l'Occident afin de renforcer sa présence, notamment, dans les pays d'Afrique. Nous avons subi, ces dernières années, des attaques massives.
En commission des affaires européennes, Raphaël Glucksmann et d'autres personnalités nous ont invités à mettre fin à la culture du secret et à éviter le terrain de la guerre hybride en rendant publiques les informations sur les tentatives d'ingérence que nous subissons. Cette nouvelle pratique constituerait une arme contre l'ingérence et la manipulation étrangères. Qu'en pensez-vous ? Vous avez affirmé que la dissimilation restait un attribut de la puissance, et on ne peut que vous donner raison dans les domaines militaire et diplomatique. Mais ne gagnerait-on pas à mieux connaître les stratégies d'ingérence et d'influence ? On a vu par exemple le poids très important qu'avait la Russie en Allemagne du fait des contrats conclus par cette dernière avec Gazprom. De même, ne faudrait-il pas décrypter publiquement les mécanismes démocratiques et en informer l'opinion ?