À la maison centrale d'Arles, les auxiliaires se renouvellent régulièrement et ils ont des profils variés. Il y a parmi eux des détenus particulièrement surveillés : il y a eu Franck Elong Abé et aussi d'autres détenus qui peuvent également être suivis dans le cadre de la radicalisation. Arles accueille les détenus les plus dangereux : soit les condamnés aux plus longues peines, soit ceux que l'on n'arrive pas à gérer dans les autres établissements, soit des profils aux troubles psychiatriques très lourds, dont cette centrale connaît une forte concentration. On mélange tous ces détenus en détention ordinaire.
Une maison centrale est au bout de la chaîne pénitentiaire ; après, il n'y a plus rien. C'est donc le dernier lieu où l'on peut gérer ces individus. Franck Elong Abé était libérable en 2023. L'établissement a voulu tenter quelque chose avec lui, peut-être préparer sa sortie par un travail. Un détenu, je l'ai dit, n'a pas vocation à rester à l'isolement pendant toute la durée de sa peine, sinon vous en faites une bombe à retardement. La maison centrale a aussi une mission de réinsertion. Il est très difficile de concilier les deux, mais il faut le faire, si bien que des décisions et des risques sont pris. Franck Elong Abé n'était pas le profil le plus dangereux de la centrale, ni le profil psychiatrique le plus lourd. Des détenus bien plus dangereux ayant commis des faits extrêmement graves préoccupaient également beaucoup. Parce que l'on parle de terroriste islamiste, tous les voyants sont allumés, mais des détenus qui ne sont pas des terroristes mais qui présentent de graves troubles psychiatriques sont à mon sens bien plus dangereux et tout aussi imprévisibles. La difficulté tient à ce que la maison centrale est le dernier maillon de la chaîne. Je ne peux pas parler à la place de mes collègues de la détention ni de la direction, mais des décisions doivent être prises et le risque zéro n'existe pas.