Intervention de Fatiha Keloua Hachi

Réunion du mercredi 1er février 2023 à 9h35
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFatiha Keloua Hachi, rapporteure :

Comme vous l'avez rappelé, madame Brugnera, notre tarif social est unique en Europe. On ne peut pas effectuer des comparaisons, car les modèles sont totalement différents. Ainsi, les pays d'Europe du Nord – Danemark, Finlande ou Suède – n'ont pas de tarif social tel que celui des Crous, mais une allocation jeunes oscillant entre 600 et 800 euros par étudiant, décorrélée des ressources des parents. J'invite donc à se concentrer sur le modèle français.

Madame Parmentier, vous avez souhaité en savoir plus sur les raisons pour lesquelles nous proposons un tarif unique. Le système actuel des bourses est inadéquat et désuet : il n'a fait l'objet d'aucune modification depuis plus de trente ans. La moitié des bénéficiaires perçoit 120 euros par mois en moyenne – les bourses étant versées dix mois sur douze –, ce qui ne saurait être considéré comme une aide sociale suffisante. En l'absence de réforme du système des bourses, les situations doivent être analysées globalement, d'où le tarif proposé de 1 euro pour tous.

Par ailleurs, le plafonnement de la tarification des repas à 1 euro permet de tendre vers la gratuité en faveur de laquelle a plaidé M. Davi.

Vous avez mal lu mon rapport, monsieur Portier, car la proposition de loi est chiffrée – elle coûterait 60 millions d'euros par an. Il est vrai que l'estimation du Gouvernement est plutôt de 90 millions, mais même l'hypothèse haute n'occasionnerait pas une grosse dépense pour l'État et tous les jeunes pourraient manger à leur faim.

Vous avez évoqué les zones blanches : elles sont effectivement très nombreuses en France. En réalité, il y a bien peu de restaurants universitaires. C'est la raison pour laquelle le dispositif proposé concerne la totalité des points de vente des Crous : les restaurants et les cafétérias universitaires – ces dernières se sont beaucoup développées et coûtent peu cher –, mais aussi les food trucks. Les Crous essaient vraiment d'élargir l'offre. À Cherbourg, qui compte 1 200 étudiants, il n'y a cependant aucun point de vente pour eux.

L'un de mes amendements vise à instaurer une programmation pluriannuelle de l'offre de restauration sur l'ensemble du territoire. En raison de leur coût élevé, il sera toutefois compliqué de construire beaucoup de restaurants universitaires, d'où l'idée de développer les petits points de vente, comme les food trucks. Ce qui compte est de pouvoir proposer un repas complet, équilibré et sain, pour 1 euro. Lorsqu'il n'existe pas de structures, il faut les créer ou recourir à des conventionnements.

Les étudiants sont infantilisés, car ils demeurent rattachés au foyer fiscal de leurs parents : jusqu'à l'âge de vingt-cinq ans, ils dépendent d'eux financièrement, y compris pour toutes les aides qu'ils sont susceptibles de recevoir par ailleurs.

Quant à la notion d'engagement auprès des autres, nous n'en avons pas la même conception, mais nous y reviendrons lors de la discussion des amendements.

Comme vous l'avez indiqué, madame Le Hénanff, le Gouvernement a recruté quarante-quatre assistantes sociales, mais cela ne permettra pas de régler la situation : il faudrait multiplier ce chiffre par dix, voire par cent. Il y a actuellement 3 millions d'étudiants en France, ce qui représente une assistante sociale pour 12 500 étudiants. Un étudiant en situation précaire a besoin d'avoir recours à une assistante sociale pour monter son dossier.

M. Acquaviva a eu raison de souligner que le système actuel des bourses ne tient pas suffisamment compte de la situation des étudiants ultramarins. J'espère que la réforme à venir le permettra. Les primes d'installation devraient notamment être augmentées. En attendant, le repas à 1 euro constituerait un palliatif.

J'ai déposé, monsieur Odoul, un amendement visant à garantir l'équilibre alimentaire. Je rappelle qu'un repas à 1 euro coûte en réalité 8 euros, la différence étant prise en charge par l'État : cela devrait permettre d'atteindre l'objectif sur lequel vous avez insisté. Par ailleurs, j'estime qu'il serait souhaitable d'afficher la provenance de la nourriture et son mode de production, mais aussi de signaler quels repas végétariens peuvent être proposés.

Vous avez raison, madame Périgault, la fréquentation des Crous est plus forte – elle connaît une hausse de 18 % cette année –, mais cela concerne davantage les repas à 3,30 euros que ceux à 1 euro. Les jeunes préfèrent se restaurer dans une structure universitaire – le plus souvent, une seule fois par jour –, plutôt que de manger chez eux, au vu de l'inflation touchant les denrées alimentaires. Il s'agit, certes, de repas à un tarif social, mais ils constituent un énorme sacrifice, comme me l'ont dit des étudiants de Seine-Saint-Denis qui sont dans l'impossibilité de payer deux repas à 3,30 euros par jour.

Le conventionnement se pratique beaucoup du côté des IUT, les instituts universitaires de technologie, par exemple à Montreuil. Ce sont des partenariats entre des établissements territoriaux – pour les cantines des lycées ou encore les espaces dédiés aux repas dans les hôpitaux – et les Crous. Une convention associant ces derniers aux collectivités est alors établie. Il faut reconnaître que les collectivités refusent souvent de s'engager dans un tel dispositif, car même si elles sont remboursées à terme, il leur est demandé de faire l'avance des fonds. Dans certains territoires, toutefois, ce modèle fonctionne très bien. Il gagnerait à être étendu, en attendant le développement et l'uniformisation des points de vente. Les jeunes pourraient ainsi accéder à des repas à 1 euro.

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