Nous sommes tout à fait d'accord avec les critiques à l'égard du système actuel des bourses étudiantes. Certains points doivent être revus, comme la référence au foyer fiscal alors que certains étudiants n'ont pas de lien avec leurs parents, ou encore le mode de calcul par seuils qui conduit souvent à exclure brutalement les enfants issus des classes moyennes. Nous sommes également d'accord sur la nécessité d'aider les étudiants qui en ont le plus besoin, mais pas n'importe comment.
Premièrement, votre proposition de loi oublie les zones blanches de la restauration universitaire. Les études ne se font pas uniquement à Paris, à Lyon ou à Marseille. Tous les étudiants n'ont pas accès à un restaurant universitaire. Les inégalités entre eux sont territoriales avant d'être sociales, et votre mesure les renforcerait.
Deuxièmement, il est dommage que vous ne donniez aucun chiffrage. Il n'existe pas d'argent magique ou qui tombe du ciel : des choix sont faits au détriment d'autres possibilités.
Enfin, nous croyons aux solidarités concrètes et incarnées, ainsi qu'à l'équilibre des droits et des devoirs, sujets sur lesquels votre proposition de loi fait totalement l'impasse.
Dans ma circonscription, plusieurs collectivités ont créé un dispositif de soutien facultatif aux jeunes qui est conditionné au fait qu'ils donnent de leur temps aux autres. Ils bénéficient, en retour, d'une aide financière versée directement à une auto-école pour réduire le coût du permis de conduire ou délivrée sous forme de bon d'achat pour acquérir un instrument de musique.
De même, la mairie de Chazay-d'Azergues, qui compte 4 000 habitants, accorde une aide aux étudiants qui s'engagent au sein de la commune, notamment lors du salon du livre. Tout le monde en est content – les jeunes, les parents, les habitants et les élus.
Autre exemple, une étudiante en stage m'a indiqué que son école appliquait le principe de l'équilibre des droits et des devoirs afin que les étudiants ne soient plus simplement des consommateurs d'aides mais aussi des acteurs en la matière. Ils peuvent participer à l'offre de restauration en cherchant des partenariats avec des producteurs locaux, en proposant des menus ou en accompagnant les personnes souffrant d'un handicap. Le champ des possibles est vaste.
L'engagement au service des autres n'est pas un fardeau, mais plutôt une chance : une chance de trouver sa voie, de sortir de son milieu familial, de se sentir valorisé parce qu'on sent que son engagement a de la valeur. En responsabilisant l'étudiant, on le prépare mieux à l'avenir. C'est une expérience à la fois humaine, sociale et professionnelle.
Êtes-vous prête à faire évoluer la proposition de loi pour qu'elle n'infantilise pas les étudiants, qu'elle ne les enferme pas dans un rôle de consommateur-spectateur, mais au contraire qu'elle leur demande de donner aux autres, afin de bénéficier de repas à 1 euro, deux heures de leur temps par semaine ? C'est le sens des amendements que je défendrai. Nous déterminerons notre vote en fonction de votre réponse.