« La République reconnaît, au sein du peuple français, les populations d'outre-mer, dans un idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité. » C'est au cœur même de notre Constitution, dont je viens de citer l'article 72, alinéa 3, que s'inscrit l'exigence de traiter les 3 millions de citoyens des collectivités ultramarines sur un pied de stricte égalité avec ceux de la métropole tout en adaptant leur traitement aux particularités qu'imposent l'éloignement géographique et, le cas échéant, l'insularité.
Possédant le deuxième plus grand domaine maritime au monde, c'est à ses territoires ultramarins que la France doit une partie de son rayonnement international. Cette particularité française d'être une nation planétaire est une richesse dont la préservation est une priorité absolue. Pourtant, la politique d'abandon suivie depuis plus d'une dizaine d'années et intensifiée durant le premier quinquennat d'Emmanuel Macron transforme, jour après jour, ces collectivités en territoires perdus de la République. Le coût de la vie est au premier rang des soucis de nos compatriotes d'outre-mer, avec un revenu médian très en deçà de celui de la métropole. Ceux-ci supportent en effet le coût d'une activité économique fragilisée qui interdit à la majorité d'entre eux d'accéder à des revenus décents.
Dans ce contexte, la réduction draconienne des avantages fiscaux dont bénéficie l'outre-mer pour compenser les spécificités géographiques de ces territoires est un très mauvais signal envoyé à la population. Nous souscrivons donc, dans l'ensemble, au constat fait dans l'exposé des motifs de ce texte. Si la forte réduction en 2017 de l'abattement sur l'impôt sur le revenu, dont 69 % à 73 % des Martiniquais, des Guadeloupéens, des Guyanais et des Réunionnais et 85 % des Mahorais ne sont pas contribuables, n'est probablement pas l'exemple le mieux choisi pour illustrer l'impact des décisions budgétaires sur le niveau de vie des classes populaires ultramarines. La forte réduction des allégements de cotisations sociales pour les indépendants et de la possibilité pour les entreprises de récupérer de la TVA non perçue a, par définition, en alourdissant les charges pesant sur l'activité économique, aggravé la situation des locaux.
Parallèlement, l'octroi de mer a pour vocation première de protéger la production agricole, artisanale et industrielle des départements d'outre-mer. Il constitue également une source majeure de recettes pour ces collectivités territoriales. Sa suppression au profit d'une TVA à 20 % serait évidemment une décision catastrophique. Pour notre part, nous soutenons une réforme de l'octroi de mer, afin d'en exclure les biens produits en France ou dans l'Union européenne qui n'entreraient en concurrence avec aucun bien produit dans les cinq départements d'outre-mer. Ainsi, celui-ci remplirait sa fonction de protection de la production ultramarine sans apporter de dégradation excessive du pouvoir d'achat des habitants.
Dans la rédaction actuelle du texte, la compétence de la commission d'enquête porte exclusivement sur les départements et régions d'outre-mer. Sur ce point qui représentait une injustice manifeste pour les habitants des autres collectivités territoriales ultramarines, concernées par les mêmes problématiques d'éloignement et d'insularité, nous saluons la décision de la commission d'étendre la portée de cette résolution aux collectivités d'outre-mer régies par l'article 74 de notre Constitution. Néanmoins, si ces amendements représentent un progrès indéniable, ils mettent tacitement de côté la Nouvelle-Calédonie, dont le statut spécial est régi par le titre XIII de notre Constitution. Fort d'une population de plus de 270 000 habitants, l'archipel, qui a subi une inflation considérable durant l'année 2022, mérité d'être étudié au même titre que les autres collectivités ultramarines par la future commission d'enquête.
Enfin, je voudrais formuler un espoir : celui que la réflexion que nous ouvrons aujourd'hui sur la situation de nos territoires ultramarins ne se limite pas à la question, évidemment centrale, du pouvoir d'achat. La politique d'abandon de ces collectivités est à interroger dans sa globalité, car ses effets se mesurent aussi dans la santé publique, dans la lutte contre l'immigration irrégulière ou encore dans l'éducation. Tous ces sujets mériteront à leur tour un débat public.
Si nous n'avons pas le courage d'aborder dans chacune de ses dimensions la grave crise que nous avons laissé s'installer en outre-mer, la défiance de nos concitoyens ne fera que s'accentuer, au risque d'un véritable divorce politique qui blesserait irréversiblement notre unité nationale. Ainsi, dans l'espoir d'un débat fructueux sur la revalorisation des collectivités ultramarines, le groupe Rassemblement national votera cette proposition de résolution.