Une longue histoire unit la France et le Sénégal et le temps est venu de renforcer cette relation qui produit des effets sur le plan juridique, mais également sur les plans économique, culturel, éducatif et en matière de sécurité. Le Sénégal est probablement notre plus grand partenaire en Afrique subsaharienne, comme en témoigne le cinquième séminaire intergouvememental qui s'est tenu en décembre. Dans un contexte de lutte contre la menace terroriste dans la bande sahélo-saharienne, la coopération en matière pénale avec nos partenaires africains revêt une importance stratégique.
En matière de coopération judiciaire, nos deux pays sont déjà liés par la convention du 29 mars 1974, laquelle couvre les questions d'entraide judiciaire mutuelle, d'extradition de personnes recherchées et de transfèrement de personnes condamnées. Néanmoins, il apparaît nécessaire de moderniser ce cadre de coopération qui n'est plus adapté compte tenu des grands bouleversements qu'a connus la région, de l'explosion de la criminalité transfrontalière à la menace terroriste dans la région sahélo-saharienne. Nos pays doivent donc pouvoir s'entraider plus efficacement. C'est l'objet des deux accords que nous examinons aujourd'hui en matière de coopération judiciaire pénale et d'extradition.
Vous aviez déjà très bien éclairé la commission, monsieur le rapporteur, en précisant qu'il s'agit essentiellement d'adapter le cadre juridique aux techniques modernes d'investigation et de communication, de faciliter le recouvrement des avoirs criminels ou encore de favoriser la fluidité des échanges. Rappelons, d'une part, que la France et le Sénégal sont déjà parties à plusieurs conventions de coopération judiciaire en matière pénale signées sous l'égide de l'Organisation des Nations unies (ONU) et que la France a déjà modernisé ses traités bilatéraux de coopération avec deux autres pays de la région sahélo-saharienne, le Niger et le Burkina Faso.
Ces deux conventions bilatérales sont, d'autre part, l'aboutissement d'une coopération technique entre magistrats français et sénégalais, qui se trouve renforcée par notre politique de développement. Des juristes d'Expertise France, filiale de l'Agence française de développement (AFD), ont ainsi reçu pour mission, depuis des années, d'améliorer notre coopération judiciaire et, plus récemment, de développer un bureau de l'entraide pénale internationale (BEPI) au Sénégal.
Si l'examen du texte en commission a fait apparaître des dissensions, je souhaite rappeler, au nom du groupe Démocrate, que notre modèle repose sur la séparation des pouvoirs et que la coopération entre les deux pays ne saurait exister si notre approche n'est pas partagée par le Sénégal. Des accords de coopération judiciaire comme ceux que nous examinons aujourd'hui ne témoignent nullement du soutien de la France au pouvoir sénégalais et à sa politique nationale, a fortiori quand un accord de ce type existe déjà depuis près de cinquante ans. Dès lors, nous ne pouvons que regretter la politisation du débat. Je rappelle que la coopération entre des juges de différents pays constitue une sécurité juridique supplémentaire car elle assure une meilleure communication et favorise l'échange de bonnes pratiques.
Le groupe Démocrate est favorable au renforcement de l'efficacité de la réponse judiciaire face aux réseaux criminels et terroristes qui se développent dans la région sur un mode transnational. Il votera en faveur du projet de loi et forme le vœu que le renforcement de la coopération avec le Sénégal permette de répondre aux critiques dont la France fait l'objet pour son action dans la région du Sahel, critiques qui se fondent souvent sur de fausses informations.