La presse est dans une situation critique : elle souffre de difficultés conjoncturelles majeures, qui viennent s'ajouter aux fragilités structurelles du secteur. Le prix de la tonne de papier a doublé en un an pour atteindre près de 900 euros en 2022. Selon les estimations de la filière, la hausse du coût du papier pourrait représenter un manque à gagner de 120 millions d'euros.
Si toute la presse est touchée à des degrés divers, la presse quotidienne régionale, dont la pagination est importante, l'est particulièrement. La hausse du coût de l'énergie affecte également le coût de distribution, de transport et de fabrication de la presse. La presse numérique n'est pas épargnée, avec la hausse des tarifs des hébergeurs.
L'augmentation des prix des quotidiens et périodiques ne peut à elle seule absorber l'augmentation du prix du papier : elle risquerait d'accélérer encore la décrue des ventes, eu égard à la forte élasticité prix des ventes de la presse papier.
Si l'on peut considérer que cette hausse des coûts qui affecte en premier lieu la presse papier ne fait qu'accélérer un mouvement inexorable de basculement total sur le numérique, il convient de rappeler que certains titres, notamment des magazines, reposent sur une qualité de pagination qui rend peu pertinent tout basculement vers le numérique.
Par ailleurs, la monétisation de la presse numérique reste difficile, bien que le volume global d'abonnements ait augmenté. En somme, si les éditeurs parviennent à absorber une part de la hausse de ces coûts, notamment au travers de l'augmentation des prix et d'une réduction de la pagination déjà décidée par une majorité d'entre eux, le risque de déstabilisation pour tout le secteur est réel – il suffit de voir ce qui se passe en Nouvelle-Calédonie.
En parallèle, il faut rappeler que la presse est, depuis 2017, inclue dans la filière à responsabilité élargie des producteurs de papiers graphiques. Toutefois, étant considérée comme un secteur particulièrement sensible, au même titre que les livres, elle a bénéficié d'une dérogation lui permettant de contribuer à sa filière sous la forme de prestations en nature, par la mise à disposition d'encarts publicitaires destinés à informer le consommateur sur la nécessité de favoriser le geste de tri et le recyclage du papier.
La loi Agec de 2020 a mis un terme à ce régime dérogatoire, disposant qu'à compter du 1er janvier 2023, l'écocontribution de la presse doit être numéraire. Ce financement direct pour la presse représente entre 15 et 22 millions d'euros. La présente proposition de loi vise à exempter la presse de la filière REP des papiers graphiques, à la condition qu'une convention de partenariat soit signée avec l'État, convention engageant la presse à mettre à disposition gratuitement des encarts destinés à communiquer auprès des lecteurs sur la transition écologique. Cela représente un élargissement des messages qui ont été diffusés depuis de nombreuses années.
La convention de partenariat sera à la fois un outil négocié par les syndicats de presse et le support de la volonté de l'État – et de la nôtre – de continuer à attendre que la presse ait un engagement total envers des processus de fabrication plus propres et durables, ainsi qu'un recyclage des déchets issus de la presse. Il est capital que les collectivités territoriales puissent bénéficier d'un tel dispositif d'encarts : informer sur les gestes de tri et l'économie circulaire continue à être nécessaire pour sensibiliser les Français.
Il convient de donner à la presse les outils pour prendre pleinement part aux défis de la transition écologique, tout en l'accompagnant face à la crise qu'elle traverse, notamment dans un souci de préserver la PQR dans nos territoires respectifs. Afin d'aller plus loin en matière d'écologie et d'accompagnement des collectivités territoriales, j'ai ainsi déposé des amendements qui répondront aux attentes de chacun des groupes.