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Intervention de Richard Ramos

Séance en hémicycle du mercredi 25 janvier 2023 à 15h00
Limitation de l'engrillagement des espaces naturels et protection de la propriété privée — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRichard Ramos, rapporteur de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire :

Nous arrivons au terme de l'examen de la proposition de loi visant à limiter l'engrillagement des espaces naturels et à protéger la propriété privée. Nous avons réalisé, et je m'en réjouis, un travail consensuel, mené avec l'ensemble des groupes politiques ainsi qu'avec nos collègues sénateurs, sans oublier madame la secrétaire d'État et ses services. Ensemble, nous nous sommes accordés sur un texte juste, permettant l'équilibre entre la libre circulation des animaux sauvages et le respect de la propriété privée.

Je remercie tous nos collègues de la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire, en particulier son président Jean-Marc Zulesi, ainsi que tous ceux, issus de tous les groupes politiques, qui ont participé à l'élaboration de cette proposition de loi. Elle est l'illustration de l'activité parlementaire accomplie dans l'intérêt des territoires. Je tiens à souligner l'excellent travail de notre collègue sénateur Jean-Noël Cardoux, auteur initial de la proposition de loi et très engagé sur les sujets relatifs à la nature. Je le remercie pour son implication et nos échanges constructifs, même s'ils ont parfois été vifs. Je salue également notre collègue sénateur Laurent Somon, rapporteur de ce texte lors des deux lectures. Je vous remercie également, madame la secrétaire d'État, ainsi que votre équipe, pour le travail effectué à nos côtés. Enfin, je remercie les associations qui œuvrent depuis des années, sans relâche, en faveur du désengrillagement. Une fois encore, le travail parlementaire traduit la reconnaissance de l'engagement de ces milliers de bénévoles qui essaient d'agir pour le bien commun.

Lors de la première lecture, nous avons adopté différentes mesures permettant de consolider le texte. Ainsi, nous avons établi que les nouvelles clôtures, ainsi que celles érigées depuis moins de vingt ans, devront se mettre en conformité avec les dispositions de la présente proposition de loi. Nous avons précisé les exceptions prévues pour certaines clôtures, telles que celles entourant les parcelles agricoles, celles revêtant un caractère historique ou patrimonial ou encore celles liées à la sécurité routière. Je le dis à ceux qui voudraient, demain, aller au tribunal dans l'espoir de contourner la loi : l'esprit de celle-ci est que les clôtures soient enlevées – à l'exception des cas que je viens d'évoquer. La règle est donc simple, c'est l'interdiction des clôtures, et elle devra être respectée. Celles qui ne seront pas conformes aux nouvelles règles ne pourront plus être posées ou maintenues. Les exceptions citées plus haut ne pourront être autorisées, comme l'a rappelé Mme la secrétaire d'État, que par l'administration.

Nous avons accru les pouvoirs de contrôle des agents de développement assermentés des fédérations départementales des chasseurs. Nous avons abaissé le niveau de la contravention de la cinquième à la quatrième classe – suivant en cela une proposition de notre collègue du groupe Écologiste – NUPES, Mme Lisa Belluco –, contravention qui s'applique en cas de pénétration non autorisée au sein d'une propriété privée, dont les limites devront être matérialisées. En effet, il nous a paru trop sévère vis-à-vis de nos concitoyens, en particulier des promeneurs, d'établir une contravention de cinquième classe. Enfin, nous avons réservé l'utilisation du fonds biodiversité pour le retrait des clôtures à leur remplacement par des haies bénéfiques à la biodiversité.

De retour à l'Assemblée nationale après une deuxième lecture au Sénat, le texte a été examiné en commission du développement durable et de l'aménagement du territoire le 18 janvier, selon la procédure de législation en commission, dite Plec. L'article 5 sur l'agrainage et l'affouragement en enclos était le seul restant en discussion : aucun amendement n'ayant été déposé, il a été adopté dans une version conforme à celle du Sénat. Voté à la quasi-unanimité, ce texte, mes chers collègues, nous permet de réaffirmer une ultime fois combien la libre circulation des animaux sauvages est importante et qu'il nous faut la garantir partout en France.

Combien de fois le fléau de l'engrillagement a-t-il été évoqué dans nos murs ou dans les territoires ? Nous en parlions depuis si longtemps, ici et dans les territoires touchés, en particulier en Sologne, région à l'origine du terme spécifique inventé pour désigner le phénomène : la « Solognisation ». Plusieurs propositions de loi ont même été déposées au cours des dernières années pour tenter d'enrayer cette tendance, notamment celle du député François Cormier-Bouligeon.

Emprisonner la nature, contraindre les animaux sauvages en les empêchant de circuler librement d'une parcelle à une autre, voilà l'un des aspects néfastes de l'engrillagement. Nous pourrions également évoquer les difficultés d'accès des pompiers lors d'incendies ou encore les problèmes d'attractivité touristique de ces secteurs enlaidis par les grillages. Alors, pourquoi ériger de telles clôtures, hautes de deux mètres et enfoncées dans le sol ? Pour protéger la propriété privée ? Sans doute, mais cela ne concerne que quelques-uns. Ne nous le cachons pas : ne serait-ce pas plutôt pour pratiquer un ball-trap vivant, contraire à l'esprit même de la chasse ?

N'emprisonnons pas les animaux, laissons-les courir librement dans les forêts. Dans un monde souvent trop urbanisé, protégeons les espaces sauvages, les forêts, ces lieux où les animaux sont rois. Libérons nos paysages de ces barrières, comme l'écrit si bien le réalisateur et écrivain Jean-Pierre Fleury – pour une fois, je ne citerai pas Maurice Genevoix, entré au Panthéon –, dans son ouvrage Mes chemins buissonniers : « Mon bois n'a guère de frontières. Ses chemins n'ont pas de clôture, pas de barrière, ni dans l'espace ni dans le temps. Ils vont dans des endroits magiques où, si l'on en a envie, on peut voir se côtoyer des faits et des êtres largement authentiques, hautement vraisemblables, qui vécurent et se produisirent en des lieux et en des temps parfois bien différents, souvent bien éparpillés. Les chemins de halliers qui me conduisent sont difficiles à trouver. C'est souvent un labyrinthe. […] Si vous voulez vous aussi vous y promener, c'est en vous que vous devrez trouver l'itinéraire. Dans vos souvenirs, dans vos tripes, dans votre cœur. »

Mes chers collègues, cessons de maltraiter nos animaux sauvages, nos milieux naturels, nos forêts, nos cours d'eaux, toute notre biodiversité. Dans ce monde trop artificiel que nous avons créé, reprenons les choses en main et faisons tout pour qu'à nouveau notre belle nature s'épanouisse, avec les animaux. La présente proposition de loi y contribue. Enlevons ces grillages laids sur lesquels s'éventrent les animaux, pour les laisser à nouveau se déplacer sans entraves ni contraintes. Vive la nature et vive la liberté !

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